Les grands empires en 1918
L’ordre
international, un ordre construit, stato-centré et post-impérial
Puisque
l’on vit dans un système international, il faut avoir une vision claire de cet
ordre international.
I.
Un ordre international
construit
On peut classer
l’ordre international en quatre grands systèmes : les approches réalistes
et néoréalistes, les approches libérales, les approches marxistes et les
approches constructivistes.
Pour les approches
réalistes, la structure au centre de l’ordre mondial est la guerre. Selon Hobbes puis Locke,
l’homme est un loup pour l’homme.
On a donc des approches soulignant le critère militaire comme le souligne Lausewitz. C’est une vision classique de la
politique qu’on retrouve de Machiavel à Weber, et qui perdure dans bien des analyses
contemporaines. La Russie possède essentiellement un angle d’analyse de ce
type, mais pas seulement. Les
néo-réalistes ont une approche un peu plus raffinée s’appuyant sur l’intérêt
des États, le monde est une course à la puissance. Morgenthau
est l’auteur le plus connu de cette analyse. Les acteurs luttent entre eux pour acquérir et conserver leur
puissance. Ce genre d’analyse peut se retrouver dans les analyses de
certains des acteurs chinois. Cette lutte pour la puissance assure alors un
équilibre des États forts. Ainsi, la puissance atomique est analysée ainsi, un
équilibre des puissances atomiques, empêchant des guerres directes. Bien
évidemment, la critique de cette analyse
souligne que les guerres peuvent être indirectes. L’ordre stable par
concurrence entre les États pour la puissance, assure donc un équilibre des
forces. Cela mène à l’analyse récente et en plein essor d’un G2 : les
USA et la Chine se partagent le monde en conservant une forme d’équilibre entre
eux.
Le paradigme
libéral, aussi appelé idéalisme, nous est venu de Kant.
Son application politique la plus connu est sous Wilson.
L’ordre international n’est pas fondé sur la guerre mais sur des acteurs qui
vont trouver leur intérêt en coopérant. L’avantage
est qu’on peut alors prendre en compte les régimes politiques internes à chaque
pays. Ainsi, les Révolutions Arabes ont été vues comme une chance, entre
autre parce que ces pays deviendraient des démocraties sur qui assurerait de
meilleures coopérations entre les États. Dans cette analyse, la Chine pose plus
de soucis que dans l’analyse réaliste (Tibet, droits de l’homme, parti
communiste omniprésent, …). Autre atout, on prend en compte davantage d’acteurs :
ONG, associations, multinationales, … Bertrand Badie par est un contemporain de
cette analyse. C’est une analyse fortement présente en France ou aux USA. Rosenau, prenant en compte tout les acteurs, vient
à en dire que les États dans le monde international sont en baisse de pouvoir.
Les approches
marxistes ou structuralistes soulignent que le conflit de la lutte des classes
est simplement transposé à l’échelle internationale. Un auteur néo-marxiste comme Wallenstein
nuance davantage, il oppose des États centraux et des États périphériques ou
semi-périphériques (par exemple le G7 contre les autres pays). Ces analyses
sont très présentes dans les milieux diplomatiques. Ce sont des approches
critiques évidemment.
Les approches
« constructivistes » lisent le monde de différentes façons. Les
intérêts des États ne sont en fait que des construits subjectifs. C’est l’idée
que la culture est un construit par l’État qui en vient donc à l’imposer au
reste de la société.
Par exemple, l’idée d’union européenne est une pure construction des États
membres. Huntington,
pourtant très critiqué dans son ouvrage, The
clash of civilization, pose l’idée que les huit cultures religieuses
provoqueront les guerres d’avenirs.
II.
Un ordre
international stato-centré
L’idée est que
l’ordre international est véritablement caractérisé par son caractère centré
sur les États. Cela date de 1648 avec le traité de Westphalie où l’on passe
d’un ordre monarchique et dynastique à un ordre plus étatique. Depuis cette
période, on a alors une forme de continuité. L’État devient donc l’acteur
principal de cet ordre et ce de plus en plus. En effet, le nombre d’États à explosé ces dernières
années, les ambassades et consulats se sont multipliés. Au Mali, le conflit en
cour vient d’un État faible avec des frontières floues et poreuses. Cet État
défaillant montre bien que l’ordre international repose sur les États puisque
celui-ci en danger, il devient un problème majeur. On peut aussi opérer des
distinctions entre les États plus ou moins forts.
Ainsi, Weber
décrit l’État comme « une entreprise
politique à caractère institutionnel qui revendique avec succès le monopole de
la contrainte physique (violence) légitime » (Économie et société). Au Mali, l’État revendique sans succès
ce monopole de la contrainte physique légitime. De plus, les islamistes ont
déclaré l’État de l’Azawad au Nord-Est du Mali, État très contrôlé mais pas
plus solide. Il n’y a pas de représentant, pas d’interlocuteurs, …
Au contraire de l’État
wébérien représenté par le Mali, on a les États somalisés où l’État de Somalie n’existe
plus puisqu’il ne revendique pas cette contrainte physique. Il ne contrôle donc
ni la population, ni le territoire, c’est un État fantoche. Cette construction
wébérienne de l’État peut s’appliquer partout : en Libye ou l’État
souhaite contrôler sans succès son territoire, en Afghanistan, un pays
semi-somalisé, une Syrie divisé en deux États en lutte, … Mais ces analyses
restent donc entièrement fondées sur une analyse en termes d’États.
Face à tous ces États
somalisés, on trouve les États forts
qui se démarquent souvent par des États possédant une multiplicité
d’ambassades. La France est passée de 16 ambassades en 1939 à 156 en 2012.
Les enjeux des États émergents étant d’ailleurs l’ouverture d’ambassades dans
le monde. De plus, les États continuent à naître. En juillet 2011, l’ONU a
reconnu l’État du Soudan du Sud, 193 État à l’ONU. C’est cette institution qui
orchestre le jeu des États.
III.
Un ordre
international « post-impérial »
Le legs postcolonial
peut avoir une influence forte sur l’apparition ou le fonctionnement des États. Cette trace passe soit sur
les ??? de la colonisation, soit sur les frontières laissées à l’État,
soit par la décolonisation parfois bien peu maîtrisée ou encore lorsque l’on
est en situation du post-colonialisme, c'est-à-dire que l’ancien pays colonial
a gardé une influence sur le nouvel État indépendant (ces nouveaux États étant
parfois indépendants de nom, mais dépendant économiquement de leur métropole). Mbembé
a beaucoup travaillé sur cette question des États postcoloniaux qui sont
d’ailleurs les plus nombreux dans le monde (Afrique, Orient, Océanie, Amérique
du Sud). Mieux vaut parler d’État post-impérial,
le terme est plus large que postcolonial.
Pour caractériser
cet ordre post-impérial, on peut distinguer les empires centraux et les empires
secondaires.
1.
Les empires principaux
A.
L’empire britannique
Cet empire était
universel, il s’étendait sur plusieurs continents. On parle aussi d’un empire
indirect, on s’appuyait sur les élites locales pour les préparer à gouverner le
pays ensuite. Enfin, on évoque aussi une thalassocratie pour qualifier cet empire,
puisqu’il s’étend essentiellement sur des mers contrôlant de nombreux détroits
et îles. C’est aussi un empire très
ancien puisqu’il était déjà un empire sous l’occupation des USA.
Ayant été la
métropole de nombreuses contrées, l’empire britannique garde encore des traces
de ce passé :
le Commonwealth dont la reine d’Angleterre est toujours la chef de ces États,
la trace linguistique, ou encore les liens forts, bien qu’indirects, entre les
anciennes colonies britanniques et les USA, alliés proches de leur ancienne
métropole.
La décolonisation
britannique peut se découper en 5 phases. La toute première est celle des dominions (Australie, Canada, Afrique du
Sud, …) décolonisés depuis les USA en 1776 jusqu’à l’Irlande en 1922. La deuxième phase se centre davantage sur
l’Asie ou l’empire britannique avait de nombreuses possessions. Entre 1947
et 1948, les indépendances de l’Inde, du Pakistan, d’Israël, de la Jordanie, de
la Birmanie, … Cette décolonisation très rapide n’est pas sans laisser des
traces négatives, des effets d’abandon (conflit du Cachemire entre
l’Afghanistan et le Pakistan, conflit autour du Pakistan orientale devenu
Bengladesh, …). La troisième phase eu
lieu vers 1955 (Soudan) – 1968
(Lesotho) avec la décolonisation progressive de la région africaine (Ghana,
Ouganda, Kenya, Zanzibar, Zambie, …). A cette même époque la thalassocratie
britannique se détache aussi (Malte, péninsule arabique, Chypre, …). La quatrième phase s’étale de 1968 à 1997
(Hong-Kong) et touche des territoires bien plus restreints (Papouasie Nouvelle-Guinée
en 1975, Vanuatu en 1980, Bruneï en 1983, …). Enfin la cinquième phase est actuelle avec la question de savoir
que faire des territoires restant (Iles Caïman, Les Bermudes, Iles vierges
britanniques, …). Essentiellement des petits territoires situés dans des lieux
ponctuels avec un lot plus important dans les Caraïbes.
B.
L’empire colonial français
Cet empire se
caractérise par une administration directe avec des gouverneurs, préfets,
gendarmes, départements français, … Cet empire se construit sur une politique
volontariste de civilisation
des colonies (écoles, infrastructures, institutions, …). Il s’agit aussi d’un
empire moins universel que l’empire britannique et bien plus centré sur l’Afrique avec la conquête de l’Algérie en 1830.
Auparavant, la France fut peu présente dans les conquêtes des Amériques en
perdant les guerres face aux britanniques. C’est
aussi un empire dont la décolonisation est légèrement plus tardive que l’empire
britannique avec un poids du néocolonialisme qui a retardé ces indépendances.
Enfin, la décolonisation de cet empire s’est fait souvent par des guerres
coloniales qui posent plus d’un problème pour les pays récemment indépendants
(problème de morts, du travail de mémoire, du coût financier, du désarmement,
de la présence de l’armée, …).
La décolonisation
de cet empire colonial français s’est faite en seulement trois phases. Tout
d’abord entre 1945 – 1946
avec le Liban et la Syrie qui étaient aussi des mandats de l’ONU avec une
colonisation assez faible, d’où des liens plus faibles voire tendus avec la
France. On a aussi à la même époque les indépendances d’Indochine et des
protectorats (Maroc et Tunisie). La
deuxième phase de 1948 – 1952 se centre sur les pays d’Afrique avec l’Afrique
Occidentale Française (AOF) et l’Afrique Equatoriale Française (AEF). Du
coup, ces indépendances se retrouvent dans les votes à l’ONU où la France est
souvent suivie de ses anciennes colonies. En contrepartie, en cas de
difficultés dans ces anciennes colonies, la France se doit d’intervenir d’une
manière ou d’une autre, ainsi plusieurs contingents de l’armée française
stationnent dans certains de ces pays qu’ils soient en guerre ou non. Seul cas
à part, celui de l’Algérie où la décolonisation fut très difficile. En plus de
ces anciennes colonies, la France est aussi présente dans les États
anciennement colonisés par la Belgique, en particulier le Congo. Troisième phase, de 1975 à 2018, il ne
reste plus beaucoup de territoires si ce n’est les Comores, Djibouti (1977) et
quelques États insulaires de l’Océan Indien et d’autres de l’Océan Pacifique
(Vanuatu en 198 ), la Nouvelle-Calédonie (peut être en 2018), … Il reste
encore de nombreux territoires insulaires à la France : Départements et
Régions d’Outre-Mers (DROM), Pays d’Outre-Mers (POM), …
Ces anciennes
colonies sont à la fois des ressources en termes d’alliés ou de soutiens
linguistiques pour leurs anciennes métropoles
puisqu’elles assurent ainsi un réseau (Commonwealth, Organisation Internationale
Française OIF, …). Ceci dit, il y a des
contreparties, les interventions de ces anciens empires sur leurs anciennes
colonies est souvent une évidence en politique (intervention de la France au
Mali est une évidence pour des pays comme les USA ou la Chine).
2.
Les empires secondaires
Au nombre de 6
environ, ces empires sont caractérisés par leur attitude centrée sur une région
particulière avec une exploitation directe de leurs territoires. Leur réseau
est alors assez proche des États en développement. On trouve parmi ces empires. :
·
L’empire Allemand qui a certes disparu rapidement,
mais il y eu des partages avec d’autres empires plus puissants après la
Première Guerre Mondiale (notamment la France et le Royaume-Uni). C’est parce
qu’on trouve de nombreux empires dans l’Union Européenne que l’on considère
cette zone comme une zone puissante avec une forte influence.
·
L’empire Italien était plutôt réduit mais
possédait des territoires (Libye, Somalie, …). La décolonisation fut rapide,
les liens faibles mais les conséquences plutôt négatives.
·
L’empire Néerlandais qui se centrait uniquement sur
les Indes Néerlandaises (aujourd’hui Indonésie) avec une exploitation
forestière brutale et des massacres de population terribles. Leur première
indépendance en 1949 fut suivie par ??? en ???, le Surinam en 1982,
Aruba en 1996. Mais des territoires demeurent en partenariat avec d’autres
pays.
·
L’empire Belge avait des traces aussi en
Afrique avec le Congo ou République Démocratique du Congo (RDC). Par effet de
substitution, la France et l’Union Européenne gèrent ce territoire avec des
relations tendues vis-à-vis du Rwanda (qui a coupé ses relations avec la France
pendant quelques années).
·
L’empire Espagnol a eu une décolonisation très
ancienne en Amérique du Sud et en Amérique centrale dés 1810 jusqu’à 1898 avec Cuba.
A cette époque, on a défini l’uti
possidetis juris, terme législatif qui assure que quand un État devient
indépendant les frontières de la décolonisation perdurent et sont intangibles.
Cela est censé éviter les conflits multiples sur les frontières. Seuls quelques
cas rares rompent les limites coloniales comme le Soudan Sud qui s’est détaché
et à donné une nouvelle frontière. La Guinée équatoriale, indépendante en 19)
est une de seules colonies espagnoles en Afrique avec le Sahara Occidental en
1975, non-reconnu de l’ONU.
·
L’empire Portugais, historiquement centré sur le
Brésil, il s’est ensuite attaché à quelques territoires essentiellement en
Afrique ainsi que Goa en Inde, Macao en Chine ou le Timor (devenu Timor-Leste).
Ces colonies portugaises en Afrique furent touchées par de violentes guerres coloniales (Guinée-Bissau
et Cap-Vert), puis de violentes guerres postcoloniales comme en Angola et au
Mozambique. Les traces se voient par une migration forte des peuples de ces
contrées ravagées, au Portugal.
Beaucoup des États
africains sont donc pressés par ce passé colonial qui joue dans les crises en
les provoquant ou en les réglant. Ce poids passé joue énormément sur l’ordre
mondial et en particulier sur l’ONU.
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