L'hyperpuissant Captain America
La
puissance et la hiérarchisation de la politique internationale
Après
l’ordre international, le monde tel qu’il s’ordonne de lui-même, l’ONU qui
organise le système international, … Il reste donc à voir en quoi
l’organisation internationale est-elle hiérarchisée ? Cette analyse passe
donc par le concept de puissance.
I.
Les critères de la
puissance
S’il n’y a pas de
hiérarchie officielle c’est que depuis 1945,
on présuppose que tout les pays sont égaux entre eux et ont la même voix à
l’ONU. Pourtant ils sont différenciés
à bien des égards, notamment sur la puissance.
1.
Les quatre critères classiques
A.
Le critère juridique
Il s’agit essentiellement
de la place de ces États dans l’ONU. Le système onusien est inégal et met en évidence des pays plus
puissants que d’autres. Cela peut se voir au sein du Conseil de sécurité avec 5
membres permanents à l’ONU qui ont chacun un droit de véto. La plupart des
autres États n’ont pas de tels privilèges.
B.
Le critère militaire
Le critère militaire
est au centre des théories réalistes et néo-réalistes de Klauswitz. Classiquement
c’est le critère de puissance par excellence : une armée moderne,
nombreuse, avec trois types d’armées (terrestre, marine, de l’air). C’est ce que les Anglais nomment le Hard Power.
Dans
l’ordre international, on retrouve cette puissance. En effet, les membres
permanents du Conseil de Sécurité ont une grande quantité d’armes. Mais ce
genre de pays sont assez peu nombreux (Israël, Turquie avec l’armée la plus
nombreuse de l’OTAN, Inde, …) et la plupart se construisent comme le Brésil qui
a racheté un porte-avion français. Une
dizaine d’États dans le monde sont des puissances militaires et une dizaine
d’États possèdent une capacité de projection.
C.
Le critère territorial
Il s’agit là du
critère géopolitique classique du XIX° siècle
et du premier XX° siècle. La position
territoriale implique une certaine politique. Ainsi la France avait accès aux trois mers, donc
une position idéale en Europe de l’Ouest, notre État ne serait pas isolé, …
Jusqu’à
la Seconde Guerre Mondiale, cette analyse dominait. Depuis avec les transports et les nouveaux moyens de communication, cela
joue peu. Le Royaume-Uni a aussi de grands avantages par son ancien passé
d’Empire thalassocratique (Gibraltar, Chypre, …). La Chine en revanche, n’a pas
de bases territoriales hors de sa sphère régionale et du Pacifique. En cela, il
lui manque un élément d’influence majeur. En compensation, sa place en Asie
reste idéale, entre l’Asie du Sud-Est, le Pacifique et le Moyen-Orient.
D.
Le critère démographique
Avant
la Seconde Guerre Mondiale, les USA avait déjà plus de 300 millions
d’habitants. Peu d’États ont atteints ce nombre. Plus encore pour les pays avec
plus d’un milliard d’habitants qui ne sont que deux et qui en conséquence ont
une armée très nombreuse.
Les États
hectomillionnaires
(avec plus de 100 millions d’habitants) posent
la question de savoir si ce critère en
fait des grandes puissances. En tout cas, ces États hectomillionnaires
(Égypte, Indonésie, Nigéria, Brésil, Russie, Bengladesh,…) sont des puissances
régionales.
2.
Quatre nouveaux critères
A.
Le critère économique
Cette puissance
économique se mesure grâce à différents indicateurs (PIB, IDE, …). En économie,
la puissance structurelle qualifie la capacité à structurer l’économie
mondiale.
Typiquement les USA ont ce pouvoir puisque la crise qui les a touché a rebondi
sur nous. La Chine a aussi cette puissance économique. De même pour l’Allemagne
et le Japon qui ont aussi une certaine puissance économique structurelle.
B.
Le critère technologique
Longtemps
la Chine fut l’atelier du monde, alors qu’aujourd’hui c’est elle qui fabrique
plusieurs technologies de haut niveau (voitures, panneaux photovoltaïques, …). Idem
pour la Corée du Sud (Samsung), pour la France ou l’Allemagne. On reste dans
l’innovation technologique à bien des égards. Le capital humain intervient aussi dans ce critère avec des
millions d’ingénieurs qui sortent des écoles chinoises chaque année,
l’innovation risque d’aller croissante. A
cela, il faut ajouter les capacités scientifiques (ce qu’on connait des
sciences) et la capacité d’innovation.
C.
Le critère politique et diplomatique
Certains États sont
des puissances politiques et diplomatiques très importantes. Ainsi après les USA, le pays au
nombre d’ambassades le plus élevé c’est la France. Longtemps la Chine eut très
peu d’ambassades et commence à se rattraper. Cela passe aussi par les lycées de
langues, les sommets linguistiques, …
D.
Le critère culturel
On peut voir dans
ce critère l’influence des langues
telles que l’Espagne et le Portugal avec l’Amérique du Sud. L’Espagne a
l’Institut Cervantes, l’Allemagne a l’Institut Goethe ou encore la Chine
développe l’Institut Confucius. Sans être associé au critère politique et
diplomatique (comme la France) ou économique, c’est un critère qui révèle une
influence. Cela passe aussi par la littérature, le cinéma ou encore la
nourriture.
II.
Typologie des pays
1.
L’hyperpuissance
Une seule
hyperpuissance existe réellement.
La présence d’un G2 n’a pas de sens car la Chine n’est pas cette
hyperpuissance. Ce sont donc les USA
qui sont qualifiés par le terme d’hyperpuissance. Leurs atouts étant bien évidemment le cumul des critères de puissances
caractéristique avec le Hard Power et
le Soft Power. Le cinéma
américain en particulier domine dans certains pays bien qu’en France on n’en
est pas forcément conscience, puisque le cinéma français est productif.
Ce cumul des
critères de puissance fait des USA une puissance largement supérieure à la
Chine. Cela va peut être évoluer mais pour le moment, il n’y a pas
d’équivalent.
2.
Les grandes puissances
La Chine est en
pleine ascension et est en train de se constituer de nouveaux facteurs de
puissance comme celui de la culture
avec le développement croissant, bien que marginal, de la langue chinoise.
La Russie vient
ensuite avec de
nombreux critères remplis. Souvent lors de la Guerre froide, la Russie
remplissait tous les critères mais a fini par décliner (sur le plan
technologique et de l’innovation en particulier).
La France arrive
après, elle
possède elle aussi des critères dont certains ont décliné (grande puissance
territoriale en berne).
Le Royaume-Uni est aussi lié à ces aspects de
la puissance, comme l’économie avec la City.
On notera que cette
catégorie, toujours modifiable, est constituée des 3 puissances plutôt déclinantes
et l’une devenant ascendante.
3.
Les grandes puissances régionales
Le critère
juridique est très lourd et en cela bloque les puissances montantes dans ce
classement. Du coup, leur rôle est surtout régional avec un cumul de quelques
critères seulement.
Ainsi le Japon, forte économie,
technologique et à la limite culturelle et démographique. Il conserve donc une
influence dans sa région mais pas au-delà. Le Brésil rentre aussi dans cette catégorie, comme l’Inde, l’Allemagne, l’Afrique du Sud,
Dans ces pays, il y
a une pression qui fait qu’ils désirent une place permanente à l’ONU, sans
succès à cause
des autres pays qui veulent profiter de cette faille pour entrer à leur tour
sans être de vraies puissances.
On peut de nouveau
scinder ce groupe entre puissances montantes et puissances déclinantes.
4.
Les puissances régionales et locales
Ces puissances ont
un ou deux critères de puissance mais qui ne suffisent pas à les mettre sur le
même niveau que les puissances régionales. Ainsi, l’Italie
qui est membre du G8 reste assez marginale à coté de l’Allemagne. On note aussi
que ce sont ces petits pays qui bloquent
l’entrée des puissances régionales au conseil permanent de l’ONU, ils ne
veulent pas être distancés davantage.
Là
encore, il y a un partage entre des États montants, d’autres descendants.
5.
Les « non puissances »
Ce sont là les pays
qui n’ont pas particulièrement de critères de puissances mais qui ont un rôle
important localement et ponctuellement. Par exemple, le Qatar est très riche, mais concrètement, il aide à peine lors des
négociations. Il paye des affaires françaises mais en réalité, s’insère surtout
dans le système de relations françaises pour avoir un écho (participation à des
œuvres de rénovation française, aide dans la diplomatie, …). La Norvège est le lieu des débats entre
FARC et Colombie pour instaurer une paix, ils sont riches, mais nullement on
peut parler de puissance.
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