mercredi 17 octobre 2012

Sociologie politique 16 - 10 (cours 4)


 L'hyperpuissant Captain America



La puissance et la hiérarchisation de la politique internationale


Après l’ordre international, le monde tel qu’il s’ordonne de lui-même, l’ONU qui organise le système international, … Il reste donc à voir en quoi l’organisation internationale est-elle hiérarchisée ? Cette analyse passe donc par le concept de puissance.

I.                   Les critères de la puissance

S’il n’y a pas de hiérarchie officielle c’est que depuis 1945, on présuppose que tout les pays sont égaux entre eux et ont la même voix à l’ONU. Pourtant ils sont différenciés à bien des égards, notamment sur la puissance.

1.      Les quatre critères classiques

A.     Le critère juridique

Il s’agit essentiellement de la place de ces États dans l’ONU. Le système onusien est inégal et met en évidence des pays plus puissants que d’autres. Cela peut se voir au sein du Conseil de sécurité avec 5 membres permanents à l’ONU qui ont chacun un droit de véto. La plupart des autres États n’ont pas de tels privilèges.

B.     Le critère militaire

Le critère militaire est au centre des théories réalistes et néo-réalistes de Klauswitz. Classiquement c’est le critère de puissance par excellence : une armée moderne, nombreuse, avec trois types d’armées (terrestre, marine, de l’air). C’est ce que les Anglais nomment le Hard Power.
Dans l’ordre international, on retrouve cette puissance. En effet, les membres permanents du Conseil de Sécurité ont une grande quantité d’armes. Mais ce genre de pays sont assez peu nombreux (Israël, Turquie avec l’armée la plus nombreuse de l’OTAN, Inde, …) et la plupart se construisent comme le Brésil qui a racheté un porte-avion français. Une dizaine d’États dans le monde sont des puissances militaires et une dizaine d’États possèdent une capacité de projection.

C.     Le critère territorial

Il s’agit là du critère géopolitique classique du XIX° siècle et du premier XX° siècle. La position territoriale implique une certaine politique. Ainsi la France avait accès aux trois mers, donc une position idéale en Europe de l’Ouest, notre État ne serait pas isolé, …
Jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale, cette analyse dominait. Depuis avec les transports et les nouveaux moyens de communication, cela joue peu. Le Royaume-Uni a aussi de grands avantages par son ancien passé d’Empire thalassocratique (Gibraltar, Chypre, …). La Chine en revanche, n’a pas de bases territoriales hors de sa sphère régionale et du Pacifique. En cela, il lui manque un élément d’influence majeur. En compensation, sa place en Asie reste idéale, entre l’Asie du Sud-Est, le Pacifique et le Moyen-Orient.

D.     Le critère démographique

Avant la Seconde Guerre Mondiale, les USA avait déjà plus de 300 millions d’habitants. Peu d’États ont atteints ce nombre. Plus encore pour les pays avec plus d’un milliard d’habitants qui ne sont que deux et qui en conséquence ont une armée très nombreuse.
Les États hectomillionnaires (avec plus de 100 millions d’habitants) posent la question de savoir si ce critère en fait des grandes puissances. En tout cas, ces États hectomillionnaires (Égypte, Indonésie, Nigéria, Brésil, Russie, Bengladesh,…) sont des puissances régionales.

2.      Quatre nouveaux critères

A.     Le critère économique

Cette puissance économique se mesure grâce à différents indicateurs (PIB, IDE, …). En économie, la puissance structurelle qualifie la capacité à structurer l’économie mondiale. Typiquement les USA ont ce pouvoir puisque la crise qui les a touché a rebondi sur nous. La Chine a aussi cette puissance économique. De même pour l’Allemagne et le Japon qui ont aussi une certaine puissance économique structurelle.

B.      Le critère technologique

Longtemps la Chine fut l’atelier du monde, alors qu’aujourd’hui c’est elle qui fabrique plusieurs technologies de haut niveau (voitures, panneaux photovoltaïques, …). Idem pour la Corée du Sud (Samsung), pour la France ou l’Allemagne. On reste dans l’innovation technologique à bien des égards. Le capital humain intervient aussi dans ce critère avec des millions d’ingénieurs qui sortent des écoles chinoises chaque année, l’innovation risque d’aller croissante. A cela, il faut ajouter les capacités scientifiques (ce qu’on connait des sciences) et la capacité d’innovation.

C.      Le critère politique et diplomatique

Certains États sont des puissances politiques et diplomatiques très importantes. Ainsi après les USA, le pays au nombre d’ambassades le plus élevé c’est la France. Longtemps la Chine eut très peu d’ambassades et commence à se rattraper. Cela passe aussi par les lycées de langues, les sommets linguistiques, …

D.      Le critère culturel

On peut voir dans ce critère l’influence des langues telles que l’Espagne et le Portugal avec l’Amérique du Sud. L’Espagne a l’Institut Cervantes, l’Allemagne a l’Institut Goethe ou encore la Chine développe l’Institut Confucius. Sans être associé au critère politique et diplomatique (comme la France) ou économique, c’est un critère qui révèle une influence. Cela passe aussi par la littérature, le cinéma ou encore la nourriture.


II.                Typologie des pays

1.      L’hyperpuissance

Une seule hyperpuissance existe réellement. La présence d’un G2 n’a pas de sens car la Chine n’est pas cette hyperpuissance. Ce sont donc les USA qui sont qualifiés par le terme d’hyperpuissance. Leurs atouts étant bien évidemment le cumul des critères de puissances caractéristique avec le Hard Power et le Soft Power. Le cinéma américain en particulier domine dans certains pays bien qu’en France on n’en est pas forcément conscience, puisque le cinéma français est productif.
Ce cumul des critères de puissance fait des USA une puissance largement supérieure à la Chine. Cela va peut être évoluer mais pour le moment, il n’y a pas d’équivalent.





2.      Les grandes puissances

La Chine est en pleine ascension et est en train de se constituer de nouveaux facteurs de puissance comme celui de la culture avec le développement croissant, bien que marginal, de la langue chinoise.
La Russie vient ensuite avec de nombreux critères remplis. Souvent lors de la Guerre froide, la Russie remplissait tous les critères mais a fini par décliner (sur le plan technologique et de l’innovation en particulier).
La France arrive après, elle possède elle aussi des critères dont certains ont décliné (grande puissance territoriale en berne).
Le Royaume-Uni est aussi lié à ces aspects de la puissance, comme l’économie avec la City.

On notera que cette catégorie, toujours modifiable, est constituée des 3 puissances plutôt déclinantes et l’une devenant ascendante.

3.       Les grandes puissances régionales

Le critère juridique est très lourd et en cela bloque les puissances montantes dans ce classement. Du coup, leur rôle est surtout régional avec un cumul de quelques critères seulement. Ainsi le Japon, forte économie, technologique et à la limite culturelle et démographique. Il conserve donc une influence dans sa région mais pas au-delà. Le Brésil rentre aussi dans cette catégorie, comme l’Inde, l’Allemagne, l’Afrique du Sud,
Dans ces pays, il y a une pression qui fait qu’ils désirent une place permanente à l’ONU, sans succès à cause des autres pays qui veulent profiter de cette faille pour entrer à leur tour sans être de vraies puissances.
On peut de nouveau scinder ce groupe entre puissances montantes et puissances déclinantes.

4.      Les puissances régionales et locales

Ces puissances ont un ou deux critères de puissance mais qui ne suffisent pas à les mettre sur le même niveau que les puissances régionales. Ainsi, l’Italie qui est membre du G8 reste assez marginale à coté de l’Allemagne. On note aussi que ce sont ces petits pays qui bloquent l’entrée des puissances régionales au conseil permanent de l’ONU, ils ne veulent pas être distancés davantage.
Là encore, il y a un partage entre des États montants, d’autres descendants.

5.      Les « non puissances »

Ce sont là les pays qui n’ont pas particulièrement de critères de puissances mais qui ont un rôle important localement et ponctuellement. Par exemple, le Qatar est très riche, mais concrètement, il aide à peine lors des négociations. Il paye des affaires françaises mais en réalité, s’insère surtout dans le système de relations françaises pour avoir un écho (participation à des œuvres de rénovation française, aide dans la diplomatie, …). La Norvège est le lieu des débats entre FARC et Colombie pour instaurer une paix, ils sont riches, mais nullement on peut parler de puissance.

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