Le dictateur, Charlie Chaplin
Introduction
Le XX° siècle fut
marqué par un certain nombre de gouvernements monstrueux. Mais ce n’est pas
pour autant qu’ils sont apparus uniquement au XX°. On en retrouve des traces
très loin dans le passé,
chez les Romains qui ont rasé Carthage, des peuples aux animaux, en passant par
la végétation, chez les Grecs et au-delà. Au
XX° siècle, ce fut peut être pire encore. On trouve en effet, une terreur
institutionnelle légitimée par des théories et instaurée par la technique.
La mort industrielle de la Seconde Guerre Mondiale en Allemagne ou les goulags
soviets, sont assez éloignés des massacres antiques.
Au XX° siècle, on
rencontre des excès indignes et
ce d’autant plus que nous avions le sentiment que nous étions dans des
démocraties, que nous jugions très civilisées, et pourtant, des preuves nous
montrent que nous ne sommes pas si civilisés que nous le pensions. Le XX° siècle fait des abominations sans
noms, remettant en cause notre civilité. Des auteurs quand Switerblack
(???) estimant qu’on n’a pas besoin de lire Goethe pour en arriver là. Cette époque est un séisme dans les esprits
de nos civilisations. Cela se
produit dans des sociétés qui se pensaient vaccinées contre cela. Les
crimes sont massifs, organisés par les gouvernants au nom de leur peuple. Le plus terrible étant que l’oppression
d’état ne vise pas tant la conquête que de réaliser un système de pensée
théorique. Une théorie que l’on juge bonne mène alors à des massacres
terribles que son meurtrier juge bien ou nécessaire pour sa vision du bien. Ces
jugements moraux posent alors de vrais soucis comme au tribunal de Nuremberg. Les théories et les systèmes de pensée
cherchent une société parfaite et en cela sont terribles. Ces idées
prométhéennes (régénération du monde), ce messianisme laïcisé (sans lien direct
avec la religion) mène le monde à sa perte en dépit de leur attachement à une
perfection qui leur est personnelle.
Pour commettre tout
ces crimes, il faut commencer par se débarrasser du statut humain chez ceux
qu’on veut éliminer
(les Juifs en Allemagne). On se retrouve dans une abstraction qui laisse tout à
découvert. Epoque inhumaine puisque l’on sort les individus de leur statut
humain. Il y a eu méprise entre les espoirs des gens pour une société parfaite,
suivie d’une déception des peuples face à l’oppression parfaite. La politique
au lieu de tout libérer, à en fait, tout soumis. Cet espoir a duré très
longtemps et perdure en certains endroits. Le soviétisme fut le plus grand
espoir du XX° siècle, espoir de justice et d’égalité juste. Or il n’en fut rien
au final, on se demande encore les acquis positifs du soviétisme. C’est une performance dans l’échec que
représente le XX° siècle et ses régimes totalitaires. Ces régimes ont révélé
une méconnaissance totale de l’humanité, des gens avec des opinions
personnelles, des liens avec les autres, des propriétés privés, des questions
qui nous angoissent, … Les régimes totalitaires se sont appliqués à détruire
tout cela. Nulle époque ne fut si loin de la réalité humaine. Si l’on fixe la vérité comme telle, et
qu’une majorité d’individus le croit, on a une transformation de la vérité. La
vérité n’est alors plus le lien entre une personne et la réalité parfaite mais
davantage entre le discours du pouvoir
et ce qui est promis pour demain.
Cette
époque ne se limite pas aux deux totalitarismes connus. Le XX° siècle a
engendré d’autres formes inquiétantes de la pensée. Moins terrifiantes mais
tout aussi déplaisantes, on trouve les fascismes corporatifs (Mussolini +
Salazar + Ortiz + Hitler) qui ont touché tout les régimes d’Europe.
Capitalism can suck it, Kapalsky, deviantart
Le
marxisme – léninisme
Comment ce système de pensée qui se voue à libérer
l’humanité et à supprimer l’État, est-il parvenu à engendrer l’État le plus
monstrueux que l’on ait vu depuis longtemps ? Par monstrueux, on sous-entend
surtout les comparaisons avec les mêmes systèmes antérieurs qui n’avaient pas
la technologie. Comment un gouvernement et un peuple ont-ils pu laisser
commettre une extermination aussi systématique ? Comment des valeurs éthiques
voire spiritualistes ont-elles été dévoyées jusqu’à produire des dictatures
violentes, fières d’elles-mêmes, parfois antisémites (Roumanie) ?
Pourquoi
est-ce que la Révolution égalitaire n’a pas eu lieu, alors qu’elle fut portée
pendant des années et soutenue par beaucoup de peuples ? Comment se
fait-il que cette pensée pluraliste s’est imposée face à des adversaires plus
forts qu’elle (les totalitarismes) ?
Au XX° siècle, il y
a une tentative de réaliser par la Terreur des utopies assez anciennes (Thomas
More). Les idéologies modernes
traduisent toutes, un choc lié à l’acceptation de la modernité, un regret de
l’ancienne société communautaire qui n’avait ni individualisme, ni
libéralisme économique, … La technique
est aussi responsable avec des textes de philosophes soulignant son rôle.
Ce genre de mal être se retrouve à de nombreuses époques mais en revanche, on
n’est jamais arrivé à des systèmes si monstrueux.
L’existence de ces
totalitarismes fut rendu possible par deux conditions. D’une part, la philosophie
moderne a rendu possibles les idéologies modernes. Ces philosophies sont
enracinées dans une forme de subjectivisme qui rend tout possible. De plus, les
grandes certitudes morales, souvent issues du christianisme, s’effondrent
toutes, ce qui
amène à revoir ces certitudes brisées (les Juifs sont-ils vraiment des
hommes ?). D’autre part, il faut un
certain niveau de technique pour accompagner ces idéologies.
Pour Arendt, qui
revient sur les termes grecs, on trouve deux modes de « faire » :
praxis et poéisis.
La poéisis, c’est crée une œuvre qui
est alors votre, c’est l’invention. La praxis,
c’est aussi un mode d’invention, mais il s’agit d’accompagner quelque chose qui
au départ possède son propre fond. Les
totalitaires font alors de la politique comme si c’était de la poéisis au lieu de praxis. Du coup, en
créant de toutes pièces une société, on fabrique de manière quasi systématique
de la Terreur.
La théorie
politico-économique du marxisme – léninisme vient de la crise sociale du XIX° siècle.
Cette crise vient avec le libéralisme économique, la fin des corporations (loi Le
Chapelier) qui est apparue comme
une perte de sécurité pour les populations. Hors au XIX° siècle, les
ouvriers européens vivent dans des conditions de vie très difficiles et très
précaires (pas d’assurances sociales, pas de repos nets, pas de vacances, …). Le marxisme-léninisme naît alors de cette
crise et de son orateur, Karl Marx. Ce
philosophe moderne est très marqué par le subjectivisme, l’époque de Friedrich Nietzsche.
Les pays d’Occident
sont restés marxistes très longtemps
(France, Espagne, Belgique, …) jusqu’à
la chute de l’URSS qui a révélé les défauts de la société. La Révolution russe
de 1917 a eu une influence extraordinaire sur les autres pays d’Europe.
Cette Révolution a engendré de nombreux autres régimes apparentés de par le
monde. On a eu les régimes assimilés et d’autres régimes serfs. Dans la seconde moitié des années 1970, on
avait chaque année un nouveau pays qui tombait dans les mains des marxistes.
Seule la région australienne fut épargnée. Quand
l’URSS ne parvient pas à prendre le pays, elle pose un parti qui récupère
l’intelligentsia locale. En France, le Parti Communiste Français (PCF)
recevait des fonds de l’URSS pour son financement, avait des liens très forts,
….
La Révolution de
Lénine avait provoqué un espoir très fort dans la population. A la fin du siècle, en regardant
le bilan des pays de ce genre, on constate que les chiffres de la Terreur ne
sont pas divulgués, les catastrophes écologiques masquées, les peuples hébétés,
… Globalement le bilan est désastreux et
le pays vit dans un mensonge permanent. En conséquence, la déception provoquée
est énorme. La solution apportée immédiatement, le tournant brutal du
libéralisme n’est pas non plus la bonne solution et fut assez néfaste.
Lénine (né Vladimir
Ilitch Oulianov) et Léon Trotski sont eux deux personnages brillants.
Lénine est l’héritier de Marx, il s’en réclame, mais aussi, de Engels ainsi que
de Tchernytchevski. Marx souhaite libérer l’homme de sa condition
(de son imperfection physique et mentale, mais aussi parce que nous sommes
finis, nous devons mourir un jour).
Cette condition de l’homme est plutôt mélancolique et l’homme est d’ailleurs de
nature malheureuse. Marx veut faire une Révolution pour changer l’homme. Il
veut nous libérer de notre condition. Il faut donc bouleverser les racines du
système de l’homme. Quant il cherche la
souffrance de l’individu, Marx arrive à la conclusion que nous sommes divisés
au fond de nous-mêmes. Nous sommes en théorie libre mais nous restons liés
à notre communauté d’appartenance, ce qui nous impose de parfois nous sacrifier
pour eux. Cette déchirure entre ce que nous voulons être et ce que nous
sommes réellement nous fait donc souffrir.
Marx effectue un
déplacement pour trouver une solution à ce déchirement. Ce déplacement vient
déjà de Rousseau. Pour les deux philosophes, le malheur de l’homme est apparu à
un temps donné. L’homme
était bon à l’état de nature et a, un jour, fixé la propriété privé, source de
tout les malheurs. Pour Marx, il faut
donc détruire tout ce qui a fait le malheur des hommes depuis le jour où ce
malheur est apparu. La Révolution doit donc supprimer non pas seulement la
religion judéo-chrétienne, l’État monarchiste, la bourgeoisie, … Il faut détruire la religion en générale,
l’État en général, l’économie en général, la société en général, ... Le
héros de Marx qui va faire cela, c’est Prométhée. Prométhée incarne la
transformation du monde (comme Faust et Frankenstein après lui), c’est la
volonté de Marx, qui veut une forme de rédemption. En recréant cette époque heureuse, on ne subira plus cette déchirure.
En conséquence, le but de la Révolution est de transformer les choses en
profondeur. Pour changer l’homme en profondeur, soit Rousseau avait raison
et on peut revenir en arrière, soit il avait tort et dans ce cas en créant une
Révolution, on va mener une Terreur. Si une religion nous obligeait à devenir
des anges, il faudrait nous terroriser, mais cela ne marcherait pas plus. Les héritiers de Marx ont vu tout de suite
le problème que cela posait, ça en valait la peine mais ce serait difficile.
Marx pensait que la
lutte des classes avait toujours eu lieu. En remontant jusqu’à l’antiquité grec on voit 10%
de citoyens et 90% d’esclaves et de métèques, forme de lutte des classes selon
Marx. Et cela revient ensuite : chez les Romains ce sont les patriciens
contre les plébéiens, chez les Carolingiens, les nobles et aristocrates
s’opposent à la paysannerie, au XIX° siècle, la bourgeoisie lutte contre le
prolétariat. Donc pour Marx, toute l’histoire s’analyse comme une lutte des
classes incessantes. Le pouvoir
politique est alors toujours tenu en main par la classe supérieure. En
supprimant la lutte des classes, en les mettant sur un pied d’égalité, on a une
harmonie entre les hommes. Pour supprimer la lutte des classes, il faut
commencer par supprimer l’État qu’on supprime en annihilant les classes et la
propriété privée.
A la même époque, Marx
lit John Stuart Mill. Marx y découvre une
société étrange présente en Orient qui est appelé despotisme (pouvoir très puissant, très
centralisé qui avait tous ses sujets sous sa coupe). Ce mot venu de Montesquieu qualifie uniquement les régimes
orientaux, notamment l’Egypte des pharaons. Mill reprend le mot et montre comment l’État est une forme de
despotisme qui tient tous les individus, supprimant ainsi l’idée de classe.
Sous l’État, on n’a pas vraiment de classes mais l’État ne disparait pas, il
devient tentaculaire. Marx réalise alors que le despotisme ignore la lutte des
classes avec une micro élite qui dirige tout et un peuple taillable et
corvéable à merci. Marx voit sa théorie buter sur ce despotisme. Dedans, pas de
classes sociales, pas de propriété privée, … Une égalité totale mais un État tentaculaire. Marx prend conscience du
risque qu’il y a dans sa théorie.
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