Choisissez votre doctrine Monroe
Un ensemble
d’institutions internationales donnent un cadre juridique aux USA pour leurs agissements
sur le plan international.
Il y a aussi un cadre d’intervention des USA puisque le droit américain peut
prendre le dessus sur d’autres droits nationaux. La domination militaire américaine n’est pas exempte de limites même si
aucun pays ne peut se référer à eux. La domination culturelle et idéologique comprend
la domination charismatique sous un certain aspect. Ainsi le cinéma, les
doctrines idéologiques, … sont bien exportées dans le monde. Le discours sur la
question de la démocratie a prévalu.
On ne peut donc pas
limiter la prédominance américaine à un seul aspect comme l’écrit Mann.
Finalement,
cela est le produit d’un certain nombre d’aspects de la culture américaine du
XIX° siècle et qui est appliqué surtout au XX° siècle. Mais cet empire reste tout de même inachevé pour
de nombreux auteurs. Certains pensent que les USA ont atteints leurs limites
hégémoniques, d’autres jugent qu’elles peuvent encore croître.
Cette
hégémonie s’est retrouvée il y a 10 ans dans la doctrine de la guerre juste
reprise par les gouvernants américains, bien qu’elle fut réduite et amendée
jusqu’au mandat de d’Obama qui ne refuse pas l’expression de guerre juste mais
n’en abuse pas autant que son prédécesseur. Depuis au moins la Seconde Guerre Mondiale, la politique étrangère
américaine ne change pas radicalement lors du passage d’un occupant à un autre
dans la Maison Blanche.
Quels
sont les traits de la politique étrangère américaine depuis leur
création ?
II.
L’Empire inachevé
L’hégémonie
structurelle des USA est née progressivement car elle n’était pas dans les
gènes politiques de ce pays.
Quand et comment les USA se sont-ils mis à intervenir ? Peut-on discerner
une doctrine d’intervention cohérente, unique et durable, qui définirait toutes
les interventions depuis le début du XX° siècle ?
Selon
Aron, le risque est de tomber dans l’illusion rétrospective de fatalité en
étudiant cela.
Il n’y a pas de
conception unique et cohérente de la politique étrangère des USA au long du XX°
siècle. Edouard Luttwak avait d’ailleurs écrit Pour une politique étrangère américaine incohérente,
dans lequel il constate qu’il n’y a pas de cohérence en politique extérieure,
ce qui était un bienfait puisque les gouvernants vaincus ne voyaient pas leur
politique être prolongée. De plus les doctrines évoluent sans arrêt et il faut
s’adapter.
La culture de la
politique étrangère pour les Américains débute avec un message d’adieu de George Washington qui met en garde ses
compatriotes en 1796 contre les
« engagements enchaînant ».
Cette mise ne garde du second Président
américain durera jusqu’à la Seconde Guerre Mondiale. Washington n’invente
pas sa position, elle s’explique par le fait que la nouvelle démocratie
américaine se fonde sur le rejet de la politique européenne de guerre
permanente qui n’était jamais résolue ainsi que d’un certain nombre de système
politique dont les USA voulaient s’éloigner. La guerre d’indépendance des
colons américains est une guerre étrangère, ils se battent contre les Anglais.
Jusqu’alors, en Amérique, on a eu des luttes de créoles contre les élites
purement espagnoles. Cela explique en partie les destins différents entre
l’Amérique du Nord et l’Amérique Latine.
Les
USA déclarent leur indépendance en 1776 dans
une déclaration rédigée par Thomas Jefferson. Cette indépendance est
déclarée suite à un conflit financier, entre autres. Leur entrée en guerre révolutionnaire se fait sur la possibilité d’une
nouvelle histoire. Ils se fondent sur une relative utopie. L’utopie vient
de « atopos » qui signifie
« d’aucun lieu ». L’utopie n’est pas forcément radieuse, c’est
justement pour ça qu’il y a des institutions dans ces utopies. Pour les Américains, c’est réaliser quelque
chose que personne ne s’est encore donné les moyens de réaliser. Ils vont alors
se retrouver en but contre plusieurs risques au premier rang duquel, la menace
européenne.
Ainsi
l’ouvrage Le fédéraliste est écrit pour appuyer la constitution en
cours d’élaboration. Cet ouvrage donne
des raisons de politique étrangère à l’adoption de la nouvelle constitution.
Certains sont contre l’union fédérale qui renforce le pouvoir central, d’autres
au contraire sont pour, ces derniers sont prénommés les Fédéralistes. Ces Fédéralistes
sont bien préparés et ils ont quelques porte-paroles très doués pour faire
valoir leur opinion (Jay, Madison et Hamilton surtout). Les Antifédéralistes
ont beaucoup plus de plumes. Pourtant ce livre Le fédéraliste reste une référence dans la politique
américaine.
Dans
cet ouvrage, l’article 3 parle déjà de
politique extérieure. Il faut prévoir une cohérence des treize États pour
pouvoir se défendre des nations étrangères (sous-entendu, des Européens).
L’argument central de cet article est le danger que représentent ces nations
étrangères. L’article 6 (de Hamilton) donne
un argument pour unir les treize États. Les Américains ne se jugent pas
supérieurs aux autres individus, mais ils estiment que sans union des treize
colonies, la présence de ces États les uns à coté des autres, cela risque, par
comparaison historique, de finir par des guerres entre eux. Les Américains cherchent
un groupement politique qui réduirait ces risques. Il faut trouver une forme politique qui limite les risques de conflits
et confère une certaine possibilité de puissance contre les risques
d’incursions et d’attaques de la part des Européens. Notre bonne
nature n’est pas suffisante. Il faut, à défaut d’être réellement puissant,
projeter une image de puissance. L’image que donnent les USA est de nouveau un
élément central dans la politique étatsunienne.
Dans la politique
étrangère des USA, un épisode important va révéler et confirmer, les éléments
de la culture politique américaine. C’est l’épisode de la doctrine Monroe. Les
USA du fait de leur guerre d’indépendance et de leur passé esclavagiste,
refusent toute politique colonialiste. Ils sont foncièrement anticolonialistes.
Cette doctrine Monroe est un discours du président Monroe en décembre 1823 qu’il fait dans un contexte de
tensions avec certains États européens. Il s’agit en 1822 de reconnaître l’indépendance de
certains pays d’ibéro-Amérique (Chili, Pérou, Colombie et Mexique). Cependant
en 1823, la France et l’Espagne, soutenus par la Sainte Alliance (Russie,
Prusse et Autriche), tentent de réinstaller les Bourbons en Amérique
hispanique. La Grande-Bretagne est alors en train de s’affirmer comme l’alliée
principale des USA. Elle va donc offrir aux USA ses services, pour éviter la
réalisation du projet de rétablissement des Bourbons à la tête de l’Amérique
hispanique. La Grande-Bretagne offre
concrètement des moyens militaires dont les colons américains sont dépourvus.
Elle aurait aussi aidée à la rédaction du discours du Président Monroe (mais cela reste à
vérifier, le prof à un léger doute).
Ce discours est très prudent, il n’y a aucune menace dans les propos de Monroe.
Au cas où, la Grande-Bretagne à une armée offensive et guerrière si jamais le
besoin s’en fait sentir. Adams, le
secrétaire d’État américain, a rédigé ce discours très prudent.
Monroe affirme dans
son discours une séparation nette des USA avec l’Europe continentale. Quelques années plus tard, Tocqueville
vient étudier les USA. L’un des éléments de compréhension de la culture
politique américaine est qu’elle a substitué l’énergie du travail à l’énergie
guerrière. La valeur prépondérante est le travail, non la guerre qui est
redoutée des USA.
Monroe fait aussi
dans son discours une remarque de bon sens. Il y a proximité géographique ainsi
qu’une expérience émancipatrice commune entre les USA et l’Amérique hispanique.
De plus, il y a une proximité politique selon lui avec des républiques en Amérique et des
monarchies en Europe.
Monroe fixe alors
le principe de non-interférence des Américains. Le raisonnement est
fondamentalement anticolonialiste car les USA n’ont pas d’armée permanente
et n’en envisagent pas avant 1880. En cela, la doctrine Monroe reste une déclaration de principe puisque
la sécurité des USA est assurée par la flotte britannique. La solidarité entre
les USA et l’Amérique hispanique est primordiale.
Ce discours fut
salué avec enthousiasme par la plupart des élites ibéro-américaines. Le vice-président de la grande
Colombie, Santander, en particulier soutint cette thèse. Bolivar en revanche
émet des doutes sur l’avis de son vice-président. Ces doutes viennent du fait
que selon lui, l’Empire du moment est la Grande-Bretagne, les USA n’ont aucun
véritables pouvoir et donc dont il faut se méfier.
La
doctrine générale qui continue d’être donnée par les Américains selon ???
c’est que la doctrine Monroe ouvre la carrière au panaméricanisme, ce qu’a raté
à Bolivar qui voulait une unification sur le plan juridique. Sans que le mot soit prononcé, le
panaméricanisme ne prendra vraiment corps qu’en 1880,
on a tout de même une ébauche de cette idée qui était fondée sur la volonté
de subversion du droit dominant, le droit des gens européens. Le
panaméricanisme a donc une esquisse dans la doctrine Monroe. Il y a une remise
en cause de la configuration pratique du droit des gens Européens.
Le panaméricanisme
est signé en 1889 entre plusieurs pays
américains. Cela repose sur de nombreux accords commerciaux au départ. Ce n’est qu’en 1910 qu’est créée
l’Union Panaméricaine. Le panaméricanisme c’est aussi l’époque où les
Américains voient se forger dans leurs esprits une certaine capacité extérieure
d’intervention. De là plusieurs tendances se détachent : des
interventionnistes, des réfractaires, … Richard Olney intervient dans un
différent frontalier entre le Venezuela et le continent Sud et se positionne
comme interventionniste.
Depuis ces années 1880, on a deux moments importants :
la Guerre de Sécession et la Première Guerre Mondiale. La Guerre de Sécession,
dite Civil War, lorsqu’elle s’achève
permet d’achever l’union des États. Elle achève aussi la scission entre les Fédéralistes
et les Sudistes opposé à un renforcement du pouvoir fédéral. La dispute entre les deux
tournera notamment autour de la question de l’esclavage. Un esclave qui quitte
un État esclavagiste et se réfugie dans un État abolitionniste, devient un
homme libre. Or les États Sudistes sont esclavagistes et le fait qu’on ne leur
rende pas leurs esclaves est perçu comme une violation de la propriété privée.
De
plus, il y avait à cette époque (vers 1830) un Président très centralisateur
avec une théorie de la nullification, une
loi produite par le Congrès des USA peut être refusée d’application dans
un État. Un État fédéré peut refuser d’appliquer une loi venu de l’État
fédéral.
Tocqueville
constate la tension politique profonde entre les deux tendances. Il constate
aussi une société du Nord industrielle et une société du Sud paysanne, il voit
les soucis de la question noire qui est en conflit complet avec les principes
démocratiques et libéraux. D’où il en conclu que ces deux sociétés par toutes
leurs différences ne pouvaient vivre ensemble indéfiniment. Elles vont
forcément finir par se mettre sur la gueule.
Du coup, il pense à
ce moment là qu’il faut rapidement installer une armée américaine permanente.
Beaucoup d’Américains sont contre car ils ont horreur de la guerre. Malgré tout, on a une synergie dans les deux tendances puisque le marin
Calhoun va instaurer une marine
internationale permanente comme outil de démocratie même en période de paix.
Cette armée navale doit montrer aux autres pays que les Américains ont des capacités d’intervention même s’ils
n’aiment pas ça. Leur première intervention se fera contre les Espagnols de
l’époque, à Cuba et dans les Philippines. Ce conflit noue des relations
particulières entre Cuba et les USA, entre les Caraïbes et les USA. C’est le
début d’une arrière-cour des USA que vont devenir les Caraïbes.
La montée
progressive des USA est traduite par les propos du Président Théodore Roosevelt au début du XX° siècle. Ce discours qu’il appelle le
corollaire Roosevelt à la doctrine Monroe, insiste sur la nécessité d’ériger
une marine de guerre digne de ce nom, armée navale qui pourrait intervenir
partout. Il reprend
donc les réflexions des Fédéralistes sur la sécurité en considérant que l’intérêt international américain et la
sécurité des USA dépendent de la sécurité mondiale, qui elle-même dépend des
Américains. Les USA se donnent donc
le droit d’intervenir où ils veulent, quand ils veulent. A partir de ce
moment, avec des aléas importants, on va assister au XX° siècle à un interventionnisme isolationniste.
Ces idées et ces expressions sont fallacieuses, ce serait plutôt une
dialectique du retrait de l’engagement. Les situations tantôt
interventionnistes, tantôt isolationnistes dépendent en réalité surtout des
circonstances.
Les USA conservent
en ce début de XX° siècle, et malgré l’édification d’une armée digne de ce nom,
une forte réticence à la guerre
et se souviennent encore de l’injonction de Washington de ne pas entrer dans
des alliances enchaînantes. On le constatera avec le temps qu’ils mettent à
entrer en guerre lors des deux guerres mondiales. S’ils sont pour la victoire
des démocraties sur les despotismes, ils ne se sentent en revanche pas
responsables de ces conflits dans lesquels ils se voient mal intervenir. De plus, une fois qu’ils entrent en guerre
ils mettent quasiment toute l’économie au service de la guerre, tout comme les
autres pays entrant en guerre. C’est l’économie de guerre qui renforce le
pouvoir central. De plus, cette guerre totale, cette mise au service de
leur énergie physique et morale vient aussi d’une explication que Tocqueville
avait déjà perçue. Cette mobilisation
complète des énergies tient non seulement au contexte mais aussi à cause de
cette valeur du travail si chère aux Américains doublée de la dévalorisation de
la guerre. Le travail vous permet de vous accomplir, pas la guerre. Cette
énergie laborieuse sera entièrement placée dans l’effort de guerre et ils ne
l’arrêteront qu’à la fin de la guerre. Ainsi au XX° siècle, il n’y aura plus
de négociations de paix, le vaincu va
devoir accepter les décisions de son interlocuteur victorieux.
Les USA alternent
donc entre ces deux pôles le hard power
et les institutions internationales. Avec Woodrow Wilson,
on aura pour la première fois l’expression des deux pôles. Les USA vont
commencer à instaurer des institutions de rapports internationaux politiques
comme la Société Des Nations (SDN). Ces institutions leur permettent de
s’engager vers l’extérieur. Cette idée d’interventionnisme commence à faire son
chemin. Mais le Sénat américain ne ratifiant pas le traité de Versailles, les
USA auront crée la SDN mais n’y entreront pas.
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