mercredi 14 novembre 2012

Théories des RI 13 - 11 (cours 1)


 Une approche plus qu'idéaliste des Relations Internationales pour la marque Benetton



Introduction


Les sciences politiques regroupent de la sociologie politique, des relations internationales, des politiques comparées et la théorie politique. Cette dernière science inclue la théorie des relations internationales. La théorie politique est proche de la philosophie politique. Ceux qui s’intéressent à la théorie politique ont une visée normative, ils veulent rendre compte du devoir être. Comment est-ce que cela devrait être pour être légitime. Le modèle de l’approche normative se retrouve dans Platon qui cherche à déterminer quel est le meilleur régime possible. Cette définition permet de mettre en avant l’idée que les modèles philosophique par leur approche normative nous permettent d’apprendre quelque chose pour rendre compte des théories politiques. Cette approche normative et théorique s’oppose à une approche descriptive et empirique. L’approche descriptive se demande comment fonctionne ou comment ne fonctionne pas tel ou tel système. Plus que de s’opposer, dans les relations internationales, ces deux approches se complètent. Les modèles explicatifs sont aussi normatifs.

Les grands courants d’études des Relations Internationales (réalisme et libéralisme) sont très explicatifs mais s’appuient tout de même sur de grands philosophes d’autrefois. Les réalistes reprennent beaucoup des interprétations de Thucydide, Machiavel et Hobbes. Les réalistes qui prennent leur essor après la Seconde Guerre Mondiale estiment que les rapports entre États reposent sur des inimitiés, les Libéraux se fondent sur des rapports de coopération entre les États. D’un coté on trouve l’insociabilité, les Libéraux au contraire favorisent la sociabilité jugée naturelle chez l’homme.

Les théoriciens politiques pensent qu’on peut comprendre la théorie politique en se tournant vers les textes, les écrits intellectuels d’une élite, textes qui sont censés expliquer les théories politiques. S’intéresser aux idées, c’est s’intéresser aux idées des élites, donc aux sommets de l’État. Ce sommet de l’État donne donc une étude plutôt à droite. Les sociologues politiques en revanche étudiant le peuple en politique sont plutôt classifiés à gauche.
Cependant, la théorie politique peut aussi être inclue dans la gauche. En effet, on a des approches progressives idéalistes, des idées qui mènent à l’utopie et en cela, elles sont plutôt orientées à gauche. Aux USA, contrairement à la France, la théorie politique est jugée à gauche. D’ailleurs John Rawls dans sa Théorie de la justice politique, sera perçu en Europe comme un représentant de la sociales-démocratie.


Le fil directeur de ce cours est une question propre aux Relations Internationales. Cette question consiste à se demander que, continu du fait de ces relations, on voit une absence d’État. A l’échelle des relations Internationales il n’y pas d’ordre étatique à l’instar des relations internes aux États. C’est l’anarchie dans les Relations Internationales. Entre les États, il y a un ordre mais qui est spécifique et qu’il faut arriver à penser. Cet ordre paradoxal est un ordre distinct de l’ordre interne et qu’il faut arriver à penser par de nouveaux concepts et de nouvelles catégories.
Sans État dominant légitime qui récupère le monopole de la violence légitime, les Relations Internationales sont spécifiques par le fait que la guerre et l’usage de la violence sont toujours possibles quand bien même des États sont en paix depuis longtemps.






Thucydide


Bonus : Une carte (moyennement pertinente) qui vous permet de situer Athènes, Sparte, leurs alliés, Corinthe et Corcyre.


Thucydide


La question des Relations Internationales remonte loin dans l’Histoire. Sa première qualification remonte à l’époque des Grecs anciens avec la Guerre de Troie relatée par Homère dont Thucydide va s’inspirer pour construire une interprétation très différente.

Dans L’Iliade, c’est par le biais d’entités personnelles qu’Homère décrit les relations entre groupements politiques. Naturellement, il va y avoir la description d’un conflit entre Achille et Agamemnon autour du partage du butin et notamment de l’esclave Briséis. Achille réclame par son statut de guerrier victorieux Briséis, Agamemnon lui refuse, par son statut de roi. Dans cet extrait on voit alors le rapport religieux de ces relations.
Chez les Grecs, le rapport entre les hommes est un rapport de conflit. Pour retrouver un ordre et éviter la violence du conflit, un seul facteur joue, le recours aux divinités. Les Grecs parlent de la dikè, la justice, un ordre qui règle le cosmos. Celui qui est juste, le dikaios est celui qui se conforme aux règles de la nature, nature organisée par Zeus lui-même. Les héros doivent se soumettre à cette dikè, Achille doit donc s’y soumettre, il doit faire preuve de thémis, de droiture. Il y a donc bien cette notion religieuse. Chaque héros doit se conformer au rang dans lequel il se trouve, faire preuve d’une excellence morale, de vertu. Dans le cas contraire, le héros ne respectant pas son statut fait preuve d’hubris, de démesure. Dans le cas d’Achille, il est soumis à ces passions et menace de sombrer dans l’hubris. L’image inverse d’Achille est Ulysse qui fait dans tous les récits preuve de thémis et respecte la dikè.

Cette conception religieuse des rapports entre hommes et par ailleurs entre cités, développée dans L’Iliade va pousser Thucydide à organiser sa propre pensée contre cette vision. Relatant la guerre du Péloponnèse, Thucydide va fonder sa théorie sur un monde sans dieu.
Thucydide s’intéresse donc à la guerre du Péloponnèse avec la caractéristique du monde grec, les cités. Le monde politique grec est fragmenté en cités qui chacune revendique une identité citoyenne souvent différente. Il n’y a pas réellement d’empire grec dans notre sens où, une cité souhaiterait annexer le reste des cités. On peut tout de même parler de communauté grecque dans le sens où elles ont toutes un ennemi commun : les Perses. Tous les Grecs se construisent contre l’image du barbare qui ne parle pas le grec. Du coup, la structure politique se veut civilisée mais pas forcément libertaire.

Vient une époque ou Athènes commence à devenir une cité hégémonique dans cette communauté hellénistique. Sparte finit par se révolter contre cette cité puissante et s’affirme comme la cité opposée à Athènes. Cette guerre du Péloponnèse oppose deux groupes dans le plein épanouissement de leur force, ce qui à l’époque peut être perçu comme une guerre mondiale. Thucydide qualifie cette guerre de plus grande crise politique qui touche tout le monde civilisé et une partie du monde barbare. C’est une apogée à la fois matérielle des deux cités mais aussi une apogée symbolique. Il s’agit d’un conflit symbolique entre deux grandes visions du monde. Athènes se caractérise par son audace, par un esprit d’entreprise tendant à l’hubris, tandis que Sparte se conforme à sa loi, à une plus grande discipline et à un conservatisme.
Si on devait résumer de manière synthétique Thucydide, c’est qu’il nous démontre qu’il y a une certaine excellence et une certaine grandeur à avoir un comportement immoral. Dans le cadre de cette guerre, les Athéniens ont accumulé une puissance économique et militaire qui va nourrir une forme de crainte et plus particulièrement pour sa voisine Corinthe. Les Corinthiens vont aller chercher le soutien de Sparte pour contrebalancer la puissance athénienne dans un équilibre des pouvoirs. Un des points de friction entre Athènes et Sparte, c’est l’affaire de Corcyre, une colonie corinthienne du Nord de la Grèce. Cette colonie veut quitter sa dépendance à Corinthe. Athènes viendra soutenir Corcyre, ce qui ne sera pas sans vexer les Corinthiens. Du fait de son pouvoir Athènes va être perçue comme empiétant sur les pouvoirs des colonies indépendantes. Cela va conduire au déclenchement de la guerre, Athènes est perçue trop belliciste. En effet, Athènes va toujours conserver cet aspect réaliste où si une puissance peut atteindre son objectif, alors elle le fait et elle détermine ainsi la politique de l’époque. En revanche, les petites cités face à cette position doivent se soumettre. Cette interprétation athénienne cynique révèle en fait une position d’excellence d’Athènes qui ne respecte pas un ordre moral mais un ordre politique selon Thucydide.

Dans l’extrait du Discours de Périclès aux Athéniens, Périclès décrit les spécificités du système politique athénien. Ce régime est caractérisé par l’absence de domination, les démocrates ne veulent pas être aliénés à qui que ce soit, ils agissent par eux-mêmes et écrivent leurs propres lois. A cela, Périclès souligne l’innovation des Athéniens, leur audace qui n’entre pas en contradiction avec la loi, loi qui est la même pour tous.
Mais alors en quoi peut-on valoriser le plan de la vie politique interne et leur politique expansionniste avant et pendant la guerre du Péloponnèse ? Pour la lecture la plus simple, il y aurait une valorisation interne du respect entre les citoyens athéniens, mais appliqueraient une interprétation cynique pour les autres Grecs. En réalité, l’affirmation de la puissance sur la scène internationale est perçue comme étant le prolongement de la liberté démocratique. Périclès et les Athéniens ne se sentent pas en contradiction avec leurs lois et avec eux-mêmes. Les Athéniens ne sont pas des imitateurs, ils revendiquent leur liberté et se sentent des pionniers pour modifier le monde. Cette fierté démocratique propre au peuple de Périclès leur donne le sentiment d’une excellence humaine.

Le second extrait prend place au cœur de la Guerre du Péloponnèse, les ambassadeurs athéniens se présentent aux Méliens pour que leur cité se soumette au pouvoir d’Athènes plutôt qu’à celui de Sparte. Les Athéniens ne présentent qu’une apparence de dialogue avec les Méliens. En effet, les Athéniens en pleine guerre sont les puissants et les Méliens savent que décliner l’offre athénienne c’est leur déclarer la guerre et accepter l’offre, c’est se soumettre à Athènes.
La question pertinente pour les Athéniens c’est la question du possible. Pour eux, parler dans le sens du droit c’est être déraisonnable dans les relations internationales. La véritable valeur c’est celle de la puissance, la question « Peux-tu ? » prend le pas sur la question « Dois-tu ? ». La capacité et le possible donne une stature cynique aux Athéniens, de nouveau. Le critère du droit est juste pour la plupart des camps, chacun à des droits légitimes. Dans ce cas, seul le critère des faits permet de comparer.
Par la suite, les Méliens se placent dans une stature où les dieux prennent place tandis que les Athéniens au contraire soulignent que les hommes ne peuvent compter que sur leurs propres forces. Pour les Athéniens la loi du plus fort est celle qui prime. En effet, si le respect des dieux existe chez les Athéniens, il est évacué par l’argument du fait que les dieux ont donné la puissance aux Athéniens qui en profitent tant qu’ils le peuvent. Les Athéniens l’explicitent ensuite, si les Méliens avaient cette puissance, ils agiraient comme les Athéniens. C’est une loi de nature et rationnelle où le plus fort a le droit de commander. L’immoralité n’est pas pour autant source de désordre.
                                                                                                                                 
On reste toujours dans une approche cynique, mais l’argument des Athéniens consiste à dire que l’utilisation de la force est bonne et légitime puisque pour ceux qui doivent se placer contre Athènes ou se soumettre, ont tout intérêt à se soumettre, cela est la meilleure solution pour eux.

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