Parenthèse
sur la Tunisie :
Assassinat
d’un opposant laïc au gouvernement religieux en place. Le parti d’opposition l’attribue
(comme la majorité des Tunisiens et des médias) aux Salafistes. Les
perturbations en Tunisie et en Égypte montrent bien que ces deux pays sont de
nouveaux les épicentres des secousses. Le plus fort syndicat a appelé à la
grève, les partis de gauche aussi, … Il y a une tendance à vouloir renverser le
gouvernement et installer de nouvelles élections. Si cela s’avère vrai, ce n’est
pas pour tout de suite. On peut pour le moment assister au face à face de
forces sociales classiques : Ennahda contre le mouvement salafiste et contre les mouvements laïcs.
Discours
de Barack Obama au Caire :
Ici le Président
des USA s’adresse à l’ensemble des croyants musulmans. Dans le Premier Amendement de 1787, la liberté aux USA est affirmée, y compris
la liberté religieuse mais toujours dans l’espace privé. En même temps, le
Président prête serment sur une Bible, les billets ont écrit dessus « In God we trust ». Et pourtant,
dans le cas du billet, cela date de 1956 pour
mieux se différencier du monde des athées. Les
USA tentent de dégager le religieux de l’espace public alors que le paradoxe
américain est que la religion reste assez présente dans cet espace. Obama en s’adressant
aux Musulmans fait preuve de tolérance religieuse. Pour faire la paix il faut
se tendre la main sur la base d’un respect interconfessionnel. Il ne
choisit pas un pays, un espace territorial, il s’adresse à tous les Musulmans.
Son
but est donc la paix. Il faut identifier les bases d’intérêts communs pour
aller vers une plus grande tolérance (notamment religieuse) et in fine
atteindre la paix. Il y a un tournant
qui doit se faire. Un discours géopolitique qui se veut humaniste mais qui s’échafaude
sur le plan religieux. La tolérance est autant prônée du coté occidental que du
coté oriental.
De
ce discours, on va bien avoir un tournant. Bush issu du mouvement « Born Again » revendique jusqu’à 11%
de sympathisants dans les USA. Ce mouvement veut revenir aux valeurs initiales
du christianisme et des Pilgrim Fathers.
Ce serait un conservatisme religieux et politique très fort. Dans la religion
des USA, on a deux grands courants, l’un réformisme et démocrate, l’autre Bible Belt allant du Texas à la
Caroline, beaucoup plus conservateur et traditionaliste dans tous les domaines
(économie, politique, religieux, …).
En
2010 et 2011, c’est le retour en force des
droits de l’Homme dans la politique étrangère des USA, tout particulièrement
dans le discours de l’assemblée générale des l’ONU le 23
septembre 2010. Dans cet autre discours, les USA veulent conserver leur
leadership mais préfèrent que cela passe par la conquête des droits de l’Homme. Auparavant, on a assisté à deux
années de réalisme américain, le discours commence à être celui de la paix dés décembre 2009. Paradoxalement, il est revenu
sur une politique guerrière avec des résultats modestes. On a eu un retournement, la maison blanche ne veut plus être en
première ligne des démocraties, dans les interventions et dans la lutte
idéologique. Dans les discours de Barack Obama, les valeurs universelles
prennent beaucoup d’importance, tandis que les valeurs américaines sont
beaucoup moins de référence. Cela aboutit au printemps arabe qui a pris de
cours l’administration américaine. Seul un discours avait préparé les USA à
épouser ce mouvement, celui sur la connectivité triomphante avec Hilary Clinton. Clinton en fait un droit naturel
de même que la liberté de déplacement. Ainsi
lors du discours sur l’État de l’union du 25
janvier 2011, Barack Obama déclare que les USA soutiennent les
aspirations démocratiques de tous les peuples. En effet, mi-2009, lors de la réélection du Président Ahmadinejad, des révoltes ont éclaté en Iran et
Obama à laisser passer sans rien dire, ce qui lui fut reproché. Sur les
révolutions arabes, Obama est resté aussi discret. Lorsque le Bahreïn a connu
sa Révolution, l’Arabie Saoudite a envoyé 1 000 soldats pour écraser la
rébellion. Barack Obama s’est dit préoccupé. Plusieurs enjeux géopolitiques ont
poussé à cette réaction minimaliste : le rôle du pétrole, l’intervention
de l’allié saoudien et le risque que les Sunnites du Bahreïn tombent dans le
giron chiite iranien. En conséquence, ils ont laissé la France et l’Angleterre
intervenir en Lybie en 2011 au nom du « droit
à protéger » anglo-saxon, qui est en français, le droit d’ingérence. Au final, Obama déclarera en 2009 que « le respect de la souveraineté des États est un principe fondamental »
en s’annonçant aussi à la Chine, sans réel succès (le yuan n’a pas été réévalué
comme les USA le demandent depuis des années). Il s’agit de l’approche de la « double-voie »,
terme employé par Hilary Clinton pour qualifier la politique étrangère des USA :
mélange de dialogues et de sanctions. Ce fut le cas pour la Birmanie avec des
menaces très poussées sur le régime birman, jusqu’à ce qu’Aung San Suu Kyi soit réintégrée en politique,
suite à quoi les USA ont repris le dialogue avec la Birmanie.
Les USA veulent
rester les leaders face au déclin économique qui les frappe et à la montée en puissance
de la Chine. Pour cela, il faut moins de fardeaux sur le dos. Les Européens
doivent intervenir face aux agitations arabes (plus au Maghreb qu’ailleurs). Avec le sommet du
G20, dorénavant, 20 pays doivent redresser l’économie mondiale, pas seulement
les USA. Enfin le plus grand tournant depuis 1945,
c’est la fin de l’isolationnisme américain. De moins en moins gendarme international, les USA veulent se retirer
sauf quand ils font pression direct sur certains pays pivots (Égypte, Iran, …).
Retour
au cours :
La drogue au Liban à redéfinit l'organisation spatiale du pays
IV.
Les impacts
structurels
1.
Les déplacements de populations
Ces déplacements de
populations commencent avec l’exil palestinien qu’ils ont eux-mêmes prénommés
la Nabka, la catastrophe. C’est donc non seulement une
dispersion des Palestiniens mais aussi une vicitimisation. Evidemment, les
mouvements récurrents des Palestiniens suite aux guerres prolongeront cette Nabka. Ils partiront en Égypte, puis en
Arabie, puis au Liban, puis en Tunisie, … Les Palestiniens se caractérisent par
cette série d’exils qui en fait un « peuple sans terre ».
A
partir de 1979, les Afghans fuient vers le
Pakistan et vers l’Iran à hauteur de 20 millions de personnes (soit un quart du
peuple).
On a aussi une
fuite des élites minoritaires de cette région. Sous Gamal
Abdel Nasser en Égypte, on constate une fuite d’une grande partie des
élites égyptiennes dont une bourgeoisie d’affaires parfois étrangère (libanais,
…). Du coup, ces fuyards alimentent une tendance antimilitaire et plutôt
pro-occidentale. Ainsi, lors des coups
d’État en série, ces élites économiques et culturelles fuient. Le Liban
aussi a connu cette fuite des élites qui s’élève jusqu’à 800 000 déplacés
et 900 000 exilés soit plus de la moitié de la population déplacée entre 1975 et 1990 selon l’économiste Boutros Labaki. L’auteur parlera d’une
« terre sans peuple pour un peuple sans terre ». Quand les terres se
vident de leur population, on a un appel qui est provoqué. D’où les politiques
du père et du fils Al Assad, ???. Elisabeth
Picard parle de 600 000 syriens qui sont venus en tant que main
d’œuvre dans ces zones vides, pour bâtir des bâtiments.
Les Coptes, plutôt
membre de l’élite,
ont parfois quitté l’Égypte pour d’autres pays d’Afrique subsaharienne et des
monarchies du Golfe.
La fixation des
populations semble donc très alétaoire.
2.
Un marquage religieux croissant
La religion est
devenue un phénomène de marquage identitaire croissant. A partir des années 1960, les courants islamistes se sont
diversifiés. Georges Mutin distinguent
quatre branches principales : Wahhabbites, Chiites, Frères Musulmans et
Talibans. Le marquage religieux n’est pas à l’origine
des guerres mais devient a posteriori un phénomène important suite à celles-ci.
En conséquence, les
régimes qui se sont mis en place lors de l’émancipation de ces pays dans les années 1940 – 1950, se sont affirmés
comme militaires et laïcs.
Il y a donc séparation de l’État et du
religieux. Or le critère religieux a fini par prendre le pas sur les régimes
laïcs dès les années 1960 et explique
pour une part la situation d’aujourd’hui. Ces régimes se sont affirmés comme
modernes avec du point de vue juridique des administrations, des bureaucraties
et des services juridiques appartenant au pouvoir et censés être laïcs. Cela
est aussi passé par une modernisation de l’équipement et des grands travaux
(barrages, grands axes, aéroports, parlement, …).
Ces guerres ont
donc favorisé le marquage religieux comme critère identitaire dans le peuple.
C’est aussi ces guerres qui ont décrédibilisé les États laïcs.
3.
La fragmentation territoriale et sociétale
Si l’on prend le
Liban, autrefois un département français, on se retrouve suite à la guerre
de 1975 – 1990, dans une nouvelle
fragmentation territoriale.
Au départ, on a un littoral suivi d’une plaine littorale assez étroite sur
lequel on trouve l’essentiel des habitants et la ville de Beyrouth. Derrière se
trouve la montagne Liban (blancheur
des neiges) de 3 000 mètres qui est un lieu de refuge traditionnel comme
pour les Maronites et dans lequel on trouve beaucoup de villages et de
bourgades. Vient ensuite une plaine
intérieure, la Bekaa qui est une
vaste zone agricole. Suit ensuite une nouvelle montagne, l’Anti-Liban, dont la crête définit la frontière avec la Syrie.
Suite à la guerre,
les forces se sont fragmentées et ont entrainé une fragmentation du pays. La
balance du commerce extérieur étant déficitaire, le pays est entré dans une
économie de transfert ou semi-rentier fondée sur la drogue. La guerre n’a pas mis en place
deux camps (pro-Palestiniens, marxistes / traditionalistes, chrétiens, limite
fascistes, anti-Palestiniens). La guerre partiellise les forces selon une
logique territoriale et les nouveaux partis se fondent aussi sur cette logique.
Armées, milices, multiplication des forces, … Tout cela doit financer la guerre
et on va voir des cultures de drogues poussées sur le flan oriental de la
montagne Liban et le flan occidental de l’Anti-Liban. Il faut alors aussi un
port exportateur sécurisé qui permettent d’emporter et de revendre la drogue,
ce sera Jounich au Nord de Beyrouth. Les milices assure le transport des
drogues jusqu’à Chypre. Il faut donc tenir un axe entre les lieux de production
et le port. Cet axe va franchir les cols et les crêtes et a été construit avant
la guerre, il est tenu par la même milice. Cette milice a son QG dans Jounich
et y reçoit la drogue, l’argent et les armes. Au final, on a un fonctionnement transversal sous forme de bandes
horizontales.
Cette logique s’est
reproduite en plusieurs lieux du pays suite à la guerre. Du coup, le pays à la
géographie plutôt transversale, va voir une organisation par milices qui sera
finalement latitudinale.
Seule Beyrouth est une zone neutre et franche où toutes les milices se
rencontrent pour exporter les drogues sans qu’on s’y tue constamment.
4.
La logique du court terme sur le développement
Tout pays repose
sur une politique de développement qui se fait dans un objectif de long terme.
Or su fait des guerres, la logique du court terme prend le dessus dans le
Moyen-Orient. Ils n’arrivent pas à mener jusqu’au bout les politique
développementale de long terme, à l’exception de la Jordanie.
5.
L’affaiblissement des élites intellectuelles
Ces élites
intellectuelles ou socioculturelles sont affaiblies par l’exil mais aussi par
un progressif déficit de formation.
Dans le Liban d’avant-guerre, on avait un centre de la presse du monde arabe en
particulier du Moyen-Orient. On y trouvait les plus grands centres d’éditions
et d’imprimeries, de grands bâtiments universitaires (plus de la moitié furent
détruits durant la guerre), … Ce poids de l’expression détruit, on a vu une
baisse de la liberté d’expression au Moyen-Orient.
Il semble que le
printemps arabe ait ramené des élites influentes issues des classes moyennes
mais plus pratiquantes et moins occidentalisées. Que vont devenir ces
élites ? A voir.
6.
Un espace éclaté
De Georges Corm à d’autres auteurs, on constate
l’impossibilité d’unité de cette aire géographique que représente le
Moyen-Orient comme le Proche-Orient, avec une logique d’éclatement plus forte
qu’une logique de convergence.
7.
Une confrontation idéologique
Dorénavant, les
idéologies sont en opposition. On trouve d’un coté des coalitions démocratiques
qui s’opposent à des revendications identitaires ou souverainistes. Ainsi en Égypte ou en Tunisie
(sorte de prolongement du Moyen-Orient) on constate bien cela actuellement.
8.
La culture de violence
Du fait des
guerres, l’esprit culturel a évolué et la guerre, comme la violence, imprègne
la société. Il semble que dans ces guerres, il y ait souvent une logique de
privatisation de la guerre selon quelques canaux principaux : les milices
et le mercenariat notamment.
Par
exemple, le Hezbollah apparaît au Liban en 1982
en tant que mouvement chiite militaire et armé. C’est toujours la première
force structurelle en armement au Liban, pas en hommes. En 1986, les combattants du Hezbollah sont de moins
en moins présents, on a cru qu’ils étaient en retrait. En réalité, nous sommes
dans la période du contre-choc pétrolier, on a donc une baisse des coûts du
pétrole notamment venant de l’Iran qui est épuisé par sa guerre contre l’Irak
et qui ne peut plus trop se financer, encore moins financer le Hezbollah, quand
bien même, il est son plus grand fournisseur financier. On mélange donc dans ce
cas les milices et le mercenariat.
D’autres
exemples révèlent que les hommes d’affaires ne sont pas toujours à la tête de
milices, mais peuvent en financer une voire plusieurs quand ils en ont les
moyens.
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