vendredi 15 février 2013

Asie 13 - 02 (cours 5)


Une bonne question résumant ce cours.
 
 
Merci à Simon pour ces notes ... Vive BZH (oui il m'a fait chanté) !
 

L'émergence économique de la Chine et ses conséquences


La question est de savoir en quoi le miracle chinois diffère des autres. Dans la terminologie, la Chine ne fait pas partie du miracle asiatique selon le sens strict. Certains pensent que le repli de la Chine de l'économie mondiale pendant longtemps, a facilité le miracle asiatique. Lee Kwan Yew estime que le retrait de la Chine a facilité la tâche aux autres pays car si elle avait essayé de se développer en même temps que les autres cela aurait été moins simple. On retrouve quelques similitudes avec les économies asiatiques notamment comme l'intervention importante de l'État et la stratégie d'ouverture vers l'extérieur. Mais dans le détail, c'est assez différent.


I.                   Le contexte en Chine

La Chine a une économie planifiée dans les années 1970. On produit par plan et on produit ce qu'on veut quand on veut. Ainsi, la base de l'économie est composée de plans quinquennaux. L'État est la seule source d'économie en Chine. L'accent est mis sur l'industrie lourde à ce moment. On met en place un système collectiviste, c'est à dire que l'on a des coopératives agricoles gérées aussi par des plans qui ont des quantités imposées par l'État. Par ailleurs, on trouve un système de sécurité sociale qui marche bien, tous les services de sécurité sociale sont donnés par les entreprises (logement, soins médicaux … c'est le bol de riz en fer).
L'économie chinoise est assez repliée sur elle-même et on a peu de commerce extérieur. Les pays avec qui elle commerce, sont des pays frères.

La Chine a connu une trajectoire économique chaotique depuis 1949. C'est la période des changements de cap et des croissances en dents de scie. Dans ces tournants, on a des périodes de relâchement du contrôle de l'État suivi par des reprises en main. Par exemple, on a des épisodes de libéralisation comme avec les Cents Fleurs de 1956 à 1957 ou avec le Grand Bond qui installe une industrialisation rapide. Cela débouche sur des problèmes : du fait qu'on a délaissé l'agriculture, des famines apparaissent. Rapidement, entre 1963 et 1968, on a le troisième front qui est un programme massif de construction. On aura une petite période de retrait de l'État avant la Révolution Culturelle qui entraîna une grande désorganisation sur le plan économique de ce fait. L'impact va durer longtemps après la Révolution Culturelle car toute une génération fut marquée par cela. Cette période pré-réforme est marquée par des taux de croissance faibles. Le pays dispose d'une base industrielle solide mais qui n'est pas nécessairement adaptée. La persistance des inégalités est alors le ressort de l'économie chinoise. Ces héritages tiennent au secteur de la santé ou de l'éducation. La disparition de Mao Zedong en 1976, va faciliter l'évolution de l'économie.


II.                Le tournant

La réforme démarre en 1978 avec Deng Xiaoping et on peut la diviser en trois sous périodes.

1.      1978 – 1989

La première phase de réforme se fait avec Deng Xiaoping. Il a une vision pragmatique pour l'économie. Peu importe ce que l'on fait du moment que c'est efficace. Le pouvoir va essayer d'introduire certains éléments de marchés dans le système.
Ainsi, on permet aux agriculteurs de produire plus que le plan malgré le maintien dudit plan. L'excédent pourra être vendu et l'argent leur revient. Les agriculteurs vont se saisir de cette possibilité et l'exploiter à fond. Ils vendent sur des marchés libres. Cette vente des excédents permet aux agriculteurs de s'enrichir. Enrichis, ces agriculteurs se lancent alors dans des entreprises de bourgs et de villages, ce qui est une forme d'industrie. On n'abandonne pas le plan et on donne la possibilité de développer l'industrie en parallèle. On a aussi la même chose dans les industries chinoises urbaines mais cela a moins marché.
Au même moment, on a les premières mesures pour normaliser le système financier. Jusque là, il n'y avait qu'une banque, la Banque Populaire de Chine. Elle servait de banque centrale et aussi de banque commerciale. Dans cette période on sépare le tout et on crée quatre banques nationales. La Banque Populaire de Chine n'est plus que la banque nationale, de gestion. On a une banque pour l'agriculture, une pour l'industrie, une pour le commerce et une autre.
L'État favorise le commerce d'assemblage. On autorise des entreprises de Hong-Kong à produire en Chine. Ces entreprises peuvent implanter leurs infrastructures en Chine, importer des produits de Hong-Kong et utiliser la main d’œuvre chinoise. Elles utilisent donc le territoire chinois pour produire. En 1978, on a les premières autorisations d’implantations d’entreprises étrangères en Chine et rapidement on crée d’autres Zones Economiques Spéciales (ZES) dans le Guangdong.

On a un démarrage du modèle chinois à ce moment-là et on assiste à la mise en place d'un système dual avec coexistence du plan, associé à des mécanismes de marchés. Les deux régimes coexistent et de ce fait, l'État ne tourne pas tout de suite la page en Chine comme cela a été le cas dans les pays de l'Est (qui appartenait à l'ex-URSS). C'est une thérapie graduelle.
Tout cela est interrompu par les événements de Tianenmen. En 1992, Deng Xiaoping lance la deuxième phase de réforme en allant faire un voyage dans le Sud du pays.

2.      1992 – 2001

On a diverses mesures. La poursuite de l'ouverture des Investissements Directs Etrangers (IDE) à tout le pays et plus uniquement restreint aux ZES. On a aussi une polarisation des activités étrangères autour de trois ZES, dont Shanghai notamment. Les investisseurs ne sont plus seulement asiatiques. On a par ailleurs la poursuite de la réforme sur le plan financier avec en particulier l'ouverture de bourses de titres, la mise en place de marchés d'action à Shanghai et à Shenzhen. On retrouve les mêmes pratiques car c'est expérimental : si ça n’avait pas fonctionné, la Chine aurait fermé les marchés. C'est seulement avec l’accord des autorités que tout cela s’installe.
Une partie du capital des banques est ouvert aux étrangers. Les banques commerciales ne sont plus à 100% des banques d'État. On met un terme à la planification et le système dual disparaît. On a par ailleurs l'amorce du démantèlement des petites entreprises d'État. On ferme les entreprises jugées trop peu efficaces. On a donc énormément de chômage en Chine après cela. Il n'y a pas de volonté totale de privatisation car l'État garde quand même un monopole sur le secteur énergétique par exemple.
Enfin, on a le démarrage d'une certaine libéralisation financière qui s'accompagne avec une convertibilité du yen mais seulement pour le commerce. On assiste donc à la poursuite de la libéralisation dans cette deuxième phase et un certain retrait de l'État sans que celui-ci soit complet.

3.      De 2001 à aujourd'hui

On a une intégration de la Chine à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Les pays membres de l'organisation jugent les pays candidats. Dans le cas de la Chine, c'est les États-Unis et l'Union Européenne qui vont juger le plus car ils sont les partenaires principaux de la Chine pour les questions relatives au commerce.
On a donc toujours en Chine, la poursuite de la libéralisation des entreprises et une limitation de l'État dans ces entreprises.







III.             Le fonctionnement de l'économie chinoise

1.      Le fonctionnement

On peut émettre des réserves à la réussite économique chinoise. Toutefois, certains aspects permettent de parler d'une véritable croissance chinoise. Depuis 1978, la Chine a connu des taux de croissance extraordinairement élevés car jamais inférieurs à 8% et presque tout le temps supérieurs à 8%. C'est depuis la réforme que tout cela se passe. On a même connu des pointes à 14% – 15%. Le taux de croissance est à mettre en rapport avec le taux mondial qui est de 3,5% – 4%. On n'arrive pas à distinguer des différences de croissance entre les deux phases.

Cette croissance s'est appuyée sur un dynamisme exportateur. La Chine devenir une puissance exportatrice de premier plan. Ce n'est spectaculaire que depuis les années 1990 et 2000. On ne sait pas aujourd'hui où s'arrêtera cette croissance exportatrice. Clairement, on a l'intégration de la Chine comme puissance exportatrice dans le monde. Derrière ces exportations on a beaucoup de produits de haute technologie. On passe d'un fort taux d'exportation de textiles à des exportations du secteur électronique. On a un dynamisme à l'exportation porté par le secteur dit de haute technologie. La réussite chinoise s'est accompagnée d'un taux d'épargne élevé.

2.      Nuancer ce succès

En réalité, il ne s'agit pas d'une émergence de la Chine sur la scène internationale, c'est plutôt un retour de la Chine. De ce fait, cela enlève une partie du caractère miraculeux. Au début du XIX° siècle, la Chine représentait déjà près de 30% du PIB mondial.

La Chine est placée aujourd'hui seconde puissance économique mondiale. C'est vrai, si on prend le Produit Intérieur Brut (PIB) global du pays. Ce n'est pas une surprise car ils sont 1,4 milliards d'habitants. Or, il faut se dire que c'est plutôt extraordinaire qu'ils n'aient pas produit plus que le Japon qui n'a que 150 millions d'habitants. Le PIB par tête en Chine n'est pas le même qu'au Japon. La Chine est un poids lourd économique du fait de sa démographie. Sinon, la Chine est dans les pays intermédiaires inférieurs, soit dit plus trivialement un pays pauvre.
La stratégie de croissance est déséquilibrée car elle s’appuie excessivement sur les exportations et aussi sur les IDE. La consommation intérieure est un petit moteur en Chine. On a un investissement de 40% du PIB contre 20% Japon et 16% aux États-Unis. L'État chinois fait toujours de la relance économique quand la croissance va mal et de ce fait on a une présence étatique très forte.

Les exportations chinoises sont largement le fait d'entreprises étrangères à plus de 50%. On a donc une participation faible à la mondialisation.
La Chine continue d'importer des produits intermédiaires. La part du commerce d'assemblage est très élevée. L'essentiel de l'excédent chinois vient de son commerce d'assemblage et pas de son commerce ordinaire. Le commerce chinois dégage très peu de valeur ajoutée. Pour qu'il exporte le pays doit importer beaucoup, sa contribution à la valeur finale est très faible. La Chine exporte des produits de haute technologie mais n'y participe que très peu.
Autre nuance sur la brillante performance économique chinoise, les moteurs de cette croissance sont les exportations. Les toutes dernières années, les investissements sont proches de 40% ce qui est similaire au reste de l’Asie orientale. Troisième moteur possible, la consommation intérieure qui était pourtant faible et qui le demeure toujours. La croissance économique s’appuie peu sur la consommation intérieure, très largement tirée par les exportations et maintenant poussée par les importations (favorisées par l’Etat), le PIB intérieur reste faible. Ce repos sur les investissements est risqué et pourra si rien ne change se stopper brutalement.

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