Une bonne question résumant ce cours.
Merci à Simon pour ces notes ... Vive BZH (oui il m'a fait chanté) !
L'émergence
économique de la Chine et ses conséquences
La question
est de savoir en quoi le miracle chinois diffère des autres. Dans la
terminologie, la Chine ne fait pas partie du miracle asiatique selon le sens
strict. Certains pensent que le repli de la Chine de l'économie mondiale
pendant longtemps, a facilité le miracle asiatique. Lee
Kwan Yew estime que le retrait
de la Chine a facilité la tâche aux autres pays car si elle avait essayé de se
développer en même temps que les autres cela aurait été moins simple. On
retrouve quelques similitudes avec les économies asiatiques notamment comme
l'intervention importante de l'État et la stratégie d'ouverture vers
l'extérieur. Mais dans le détail, c'est assez différent.
I.
Le contexte en Chine
La Chine a
une économie planifiée dans les années 1970. On produit par plan et on produit ce qu'on veut quand
on veut. Ainsi, la base de l'économie est composée de plans quinquennaux. L'État est la seule source d'économie en
Chine. L'accent est mis sur l'industrie lourde à ce moment. On met en place un
système collectiviste, c'est à dire que l'on a des coopératives agricoles
gérées aussi par des plans qui ont des quantités imposées par l'État. Par ailleurs, on trouve un système de
sécurité sociale qui marche bien, tous les services de sécurité sociale
sont donnés par les entreprises (logement, soins médicaux … c'est le bol de riz
en fer).
L'économie
chinoise est assez repliée sur elle-même et on a peu de commerce extérieur. Les pays avec qui elle commerce, sont des pays
frères.
La Chine a
connu une trajectoire économique chaotique depuis
1949. C'est la période des changements de cap et des croissances en
dents de scie. Dans ces tournants, on a des périodes de relâchement du contrôle
de l'État suivi par des reprises en main. Par exemple, on a des épisodes de libéralisation comme avec les Cents
Fleurs de 1956 à 1957 ou avec le Grand Bond
qui installe une industrialisation rapide. Cela débouche sur des
problèmes : du fait qu'on a délaissé l'agriculture, des famines
apparaissent. Rapidement, entre 1963 et 1968,
on a le troisième front qui est un programme massif de construction. On aura
une petite période de retrait de l'État avant la Révolution Culturelle qui
entraîna une grande désorganisation sur le plan économique de ce fait. L'impact
va durer longtemps après la Révolution Culturelle car toute une génération fut
marquée par cela. Cette période
pré-réforme est marquée par des taux de croissance faibles. Le pays dispose
d'une base industrielle solide mais qui n'est pas nécessairement adaptée. La
persistance des inégalités est alors le ressort de l'économie chinoise. Ces
héritages tiennent au secteur de la santé ou de l'éducation. La disparition de Mao Zedong en 1976,
va faciliter l'évolution de l'économie.
II.
Le tournant
La réforme
démarre en 1978 avec Deng Xiaoping et on peut la diviser en trois sous périodes.
1. 1978 – 1989
La première phase de réforme se fait avec Deng
Xiaoping. Il a une vision pragmatique pour l'économie. Peu importe ce que l'on
fait du moment que c'est efficace. Le
pouvoir va essayer d'introduire certains éléments de marchés dans le système.
Ainsi, on
permet aux agriculteurs de produire plus que le plan malgré le maintien dudit plan. L'excédent pourra être
vendu et l'argent leur revient. Les agriculteurs vont se saisir de cette
possibilité et l'exploiter à fond. Ils vendent sur des marchés libres. Cette
vente des excédents permet aux agriculteurs de s'enrichir. Enrichis, ces agriculteurs se lancent alors dans des entreprises de
bourgs et de villages, ce qui est une forme d'industrie. On n'abandonne pas le plan et on donne la
possibilité de développer l'industrie en parallèle. On a aussi la même
chose dans les industries chinoises urbaines mais cela a moins marché.
Au même
moment, on a les premières mesures pour normaliser le système financier. Jusque
là, il n'y avait qu'une banque, la Banque Populaire de Chine. Elle servait
de banque centrale et aussi de banque commerciale. Dans cette période on sépare
le tout et on crée quatre banques nationales. La Banque Populaire de Chine
n'est plus que la banque nationale, de gestion. On a une banque pour
l'agriculture, une pour l'industrie, une pour le commerce et une autre.
L'État favorise
le commerce d'assemblage. On autorise
des entreprises de Hong-Kong à produire en Chine. Ces entreprises peuvent
implanter leurs infrastructures en Chine, importer des produits de Hong-Kong et
utiliser la main d’œuvre chinoise. Elles utilisent donc le territoire chinois
pour produire. En 1978, on a les premières autorisations d’implantations
d’entreprises étrangères en Chine et rapidement on crée d’autres Zones Economiques
Spéciales (ZES) dans le Guangdong.
On a un
démarrage du modèle chinois à ce moment-là et on assiste à la mise en place
d'un système dual avec coexistence du plan, associé à des mécanismes de
marchés. Les deux régimes coexistent
et de ce fait, l'État ne tourne pas tout de suite la page en Chine comme cela a
été le cas dans les pays de l'Est (qui appartenait à l'ex-URSS). C'est une
thérapie graduelle.
Tout cela est interrompu par les événements de
Tianenmen. En 1992, Deng Xiaoping lance la
deuxième phase de réforme en allant faire un voyage dans le Sud du pays.
2. 1992 – 2001
On a
diverses mesures. La poursuite de l'ouverture des Investissements Directs
Etrangers (IDE) à tout le pays et
plus uniquement restreint aux ZES. On a aussi une polarisation des activités
étrangères autour de trois ZES, dont Shanghai notamment. Les investisseurs ne
sont plus seulement asiatiques. On a par
ailleurs la poursuite de la réforme sur le plan financier avec en particulier
l'ouverture de bourses de titres, la mise en place de marchés d'action à
Shanghai et à Shenzhen. On retrouve les
mêmes pratiques car c'est expérimental : si ça n’avait pas fonctionné,
la Chine aurait fermé les marchés. C'est seulement avec l’accord des autorités
que tout cela s’installe.
Une partie
du capital des banques est ouvert aux étrangers. Les banques commerciales ne
sont plus à 100% des banques d'État. On met un terme à la planification et le
système dual disparaît. On a par ailleurs l'amorce du démantèlement
des petites entreprises d'État. On ferme les entreprises jugées trop peu
efficaces. On a donc énormément de chômage en Chine après cela. Il n'y a pas de volonté totale de privatisation
car l'État garde quand même un monopole sur le secteur énergétique par exemple.
Enfin, on a
le démarrage d'une certaine libéralisation financière qui s'accompagne avec une convertibilité du yen mais
seulement pour le commerce. On assiste donc à la poursuite de la libéralisation
dans cette deuxième phase et un certain retrait de l'État sans que celui-ci
soit complet.
3. De 2001 à
aujourd'hui
On a une
intégration de la Chine à l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). Les pays membres de l'organisation jugent les pays
candidats. Dans le cas de la Chine, c'est les États-Unis et l'Union Européenne
qui vont juger le plus car ils sont les partenaires principaux de la Chine pour
les questions relatives au commerce.
On a donc
toujours en Chine, la poursuite de la libéralisation des entreprises et une
limitation de l'État dans ces entreprises.
III.
Le fonctionnement de l'économie chinoise
1. Le
fonctionnement
On peut
émettre des réserves à la réussite économique chinoise. Toutefois, certains
aspects permettent de parler d'une véritable croissance chinoise. Depuis 1978, la Chine a connu des taux de
croissance extraordinairement élevés
car jamais inférieurs à 8% et presque tout le temps supérieurs à 8%. C'est
depuis la réforme que tout cela se passe. On a même connu des pointes à 14% –
15%. Le taux de croissance est à mettre en rapport avec le taux mondial qui est
de 3,5% – 4%. On n'arrive pas à distinguer des différences de croissance entre
les deux phases.
Cette
croissance s'est appuyée sur un dynamisme exportateur. La Chine devenir une
puissance exportatrice de premier plan. Ce n'est spectaculaire que depuis les années 1990 et 2000. On ne sait pas aujourd'hui où s'arrêtera cette
croissance exportatrice. Clairement, on a l'intégration de la Chine comme
puissance exportatrice dans le monde. Derrière ces exportations on a beaucoup
de produits de haute technologie. On
passe d'un fort taux d'exportation de textiles à des exportations du secteur
électronique. On a un dynamisme à l'exportation porté par le secteur dit de
haute technologie. La réussite chinoise s'est accompagnée d'un taux d'épargne
élevé.
2. Nuancer ce
succès
En réalité,
il ne s'agit pas d'une émergence de la Chine sur la scène internationale, c'est
plutôt un retour de la Chine. De ce
fait, cela enlève une partie du caractère miraculeux. Au
début du XIX° siècle, la Chine représentait déjà près de 30% du PIB
mondial.
La Chine est
placée aujourd'hui seconde puissance économique mondiale. C'est vrai, si on
prend le Produit Intérieur Brut (PIB) global du pays. Ce n'est pas une surprise car ils sont 1,4 milliards
d'habitants. Or, il faut se dire que c'est plutôt extraordinaire qu'ils n'aient
pas produit plus que le Japon qui n'a que 150 millions d'habitants. Le PIB par
tête en Chine n'est pas le même qu'au Japon. La Chine est un poids lourd économique du fait de sa démographie. Sinon,
la Chine est dans les pays intermédiaires inférieurs, soit dit plus
trivialement un pays pauvre.
La stratégie
de croissance est déséquilibrée car elle s’appuie excessivement sur les
exportations et aussi sur les IDE. La consommation intérieure est un petit
moteur en Chine. On a un
investissement de 40% du PIB contre 20% Japon et 16% aux États-Unis. L'État
chinois fait toujours de la relance économique quand la croissance va mal et de
ce fait on a une présence étatique très forte.
Les
exportations chinoises sont largement le fait d'entreprises étrangères à plus
de 50%. On a donc une participation faible à la mondialisation.
La Chine
continue d'importer des produits intermédiaires. La part du commerce
d'assemblage est très élevée. L'essentiel
de l'excédent chinois vient de son commerce d'assemblage et pas de son commerce
ordinaire. Le commerce chinois dégage très peu de valeur ajoutée. Pour qu'il
exporte le pays doit importer beaucoup, sa contribution à la valeur finale est
très faible. La Chine exporte des produits de haute technologie mais n'y
participe que très peu.
Autre nuance sur la
brillante performance économique chinoise, les moteurs de cette croissance sont
les exportations.
Les toutes dernières années, les investissements sont proches de 40% ce
qui est similaire au reste de l’Asie orientale. Troisième moteur possible, la consommation intérieure qui était
pourtant faible et qui le demeure toujours. La croissance économique s’appuie
peu sur la consommation intérieure, très largement tirée par les exportations
et maintenant poussée par les importations (favorisées par l’Etat), le PIB
intérieur reste faible. Ce repos sur les
investissements est risqué et pourra si rien ne change se stopper brutalement.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire