Mi-humain, mi-non-humain, l'ent.
Bruno
Latour,
directeur scientifique de l’IEP de Paris, Politiques
de la nature :
Selon Bruno Latour,
le contrat social doit dorénavant réunir non seulement les humains mais aussi
les non-humains. La grande idée de Latour, c’est qu’on a un préjugé
anthropocentré,
on reste fixé sur l’humain et on oublie le reste. Seuls les citoyens disposant
de la parole son dans ce contrat, il devient difficile de faire participer le
non-humain au contrat social. Selon lui, de même qu’on oppose sujet et objet,
on a tendance à associer le sujet à la politique et l’objet à la nature. En
conséquence, politique et nature se retrouve opposés. Cela se retrouve dans l’idée
où l’on oppose le lieu de l’objet, le laboratoire, au lieu du sujet, l’assemblée.
Du coup, pour Latour, il faut s’approprier
la démocratie technique, c'est-à-dire un espace qui comprenne autant l’assemblée
que le laboratoire. Les conceptions de la politique se sont limitées à séparer
politique et nature, ce qui tend à émettre l’idée qu’il y a une confrontation
entre les deux et qu’il faut forcément choisir l’un ou l’autre.
Hans Jonas,
Le principe responsabilité
(1979) :
Jonas proposait que
les politiques publiques obéissent au principe de responsabilité à l’égard des
générations futures.
Les hommes doivent répondre de leurs actions face à ce qui n’existe pas encore,
aux générations futures. Cette responsabilité est celle des individus aussi à l’égard
de la Terre et de la biosphère. A nous de nous sentir responsable de la
condition de la vie humaine sur Terre. On a donc un devoir moral envers déjà
quelque chose de non-humain. Jonas parle
de civilisation technologique pour qualifier notre société. Un changement qualitatif
fondamental a eu lieu qui transforme complètement les données, c’est qu’on
réalise que la biosphère peut disparaître complètement sous l’action de l’homme.
Ce que montre Jonas, c’est que l’exploitation intensive de la nature peut
produire une disparition de celle-ci. Pour
cela, il crée la notion d’heuristique de la peur, une manière d’être plus
lucide par la peur. Il faut reconstruire le sens de la peur, « Nous savons seulement ce qui est en jeu
lorsque nous savons que cela est en jeu ». Si le danger est éloigné,
on n’en prend pas vraiment compte pour agir et sauvegarder les choses.
Le très pénible à écrire Acide DésoxyriboNucléique ... ADN pour les intimes.
La
révolution biotechnologique
Pourquoi parler de
révolution ?
La biotechnologie si c’est une intervention technique sur le vivant, alors
celle-ci a toujours existé : techniques d’agriculture, d’élevage, de vinification
ou de fermentation, … Autant de formes de biotechnologies avec une transformation
de la nature pour obtenir des produits de consommation. Considéré comme l’ensemble des techniques pour déterminer de nouvelles
substances végétales ou microbiennes, les biotechnologies n’ont rien de nouveau
dans le cadre de l’Homme. Dés lors qu’il a commencé à organiser sa
production agricole, l’Homme est passé dans les biotechnologies le changement fondamental se fait avec la
rupture scientifique et le rôle de Louis Pasteur.
Pasteur va rationaliser ce processus scientifiquement, en décidant de
comprendre des techniques qui marchaient sans pour autant être bien comprises.
Pasteur met en évidence des microorganismes qui ont un rôle de ferment. Ce rôle
sert autant dans les processus chimiques que dans de nouveaux vaccins. En
sélectionnant les bactéries selon leurs propriétés ont peut les utiliser à bon escient
dans les bons contextes. La Révolution
pasteurienne n’est que la première des révolutions. En 1953,
Watson et Crick
instaurent la génétique, ils mettent en évidence la structure du génome en
découvrant l’Acide DésoxyriboNucléique (ADN). La structure des gènes a une
correspondance avec l’échelle du phénotype. En gros, on découvre que ce qui
se passe et s’organise à l’échelle génétique a une corrélation directe avec ce
que l’on voit à l’œil nu.
Jérémy
Rifkin dans Le
siècle biotech, raconte comment cette découverte scientifique
révolutionnaire est devenue un problème public. L’exemple concerne une anecdote
durant laquelle, sans aucune certitude, des généticiens sont parvenus à croiser
les gènes de lucioles et les gènes de la plante de tabac ce qui a donné un
tabac qui brille. Avec la découverte des
enzymes de restriction, on parvient à isoler un gène d’intérêt puis ensuite à
le faire fusionner avec le plasmide, c'est-à-dire un fragment d’ADN d’une
bactérie. C’est la découverte de la recombinaison de l’ADN, processus
reproductible plusieurs fois. Mais cela
n’est pas sans risque, en prélevant un gène mais en le détournant de son
contexte d’utilisation normale, on ne sait pas quelles sont les conséquences à
moyen ou à long terme sur ces Organismes Génétiquement Modifiés (OGM). La découverte fut faite de façon un peu
naïve, mais s’est perfectionnée, on parle d’ingénierie génétique.
Ce sont les
scientifiques eux-mêmes qui suite à leurs découvertes vont rencontrer leurs
limites et leurs propres dangers.
En 1968, on découvre les enzymes. En ????,
le professeur Paul
Berg décide de construire une molécule hybride : un virus de singe
(SV40) et une bactérie escherichia coli (ou colibacille). Le but de ce
croisement est de savoir si on peut effectuer une transgénèse entre singe et
humain. Cette première recombinaison génétique in vitro croise des espèces
différentes. Mais cela va provoquer un tollé chez les scientifiques qui jugent
en 1969, cette expérience dangereuse. Trois scientifiques tireurs d’alarmes mettent
en garde dans une revue les risques d’usage d’ingénierie génétique pour des
usages militaires, comme des armes. En effet, le SV40 grâce à la bactérie prolifère
très rapidement dans l’organisme humain, sauf qu’on découvre après coup que le
SV40 peut produire chez l’homme des effets cancérigènes. Cela risquerait de
provoquer des épidémies de cancers tout à fait dangereuses.
De
1973 à 1975, les scientifiques américains
organisent le congrès d’Asilomar pour discuter des débouchés médicaux,
scientifiques, industriels et économiques de la recombinaison de l’ADN. Ils
veulent sortir leurs études du contrôle politique. D’abord ce sont les
scientifiques seuls qui décident d’aborder la question en désirant ne pas se
faire marcher dessus par les politiques. A moment donné, un juriste intervient
pour expliquer les risques et les responsables d’une épidémie de SV40. A ce
moment seulement, les scientifiques réalisent le danger auquel ils sont
confrontés. C’est de là qu’une préoccupation d’ordre social et politique
émerge. Les scientifiques sont donc prêts à se fixer eux-mêmes les règles d’encadrement
de leurs activités plutôt que de se faire damer le pion par les politiques. En aucun cas, Asilomar n’est une conférence
pour informer les citoyens, c’est juste la prise de conscience des risques de
ce genre de questions entre scientifiques.
Dans Le siècle du gène, Evelyne Fox Meller démontre que la découverte du gène
a produit autant de connaissance que d’ignorance et de croyance. Elle l’illustre
avec le cas du monisme génétique,
la croyance que toute la génétique explique le phénotype. Or la structure de l’ADN
est plus complexe que cela avec les « ADN détritus ». Ces ADN codent
des caractères du corps qui ne sont pas véritablement utiles. Ils viennent
surtout à l’appui en cas de problème.
Dans
le Human Genome Project, on a tenté de déchiffrer l’ensemble des gènes
observables et leur articulation, mais on n’est pas parvenu à les décrypter.
Aujourd’hui, on sait juste faire des tests génétiques, encore assez limités,
dont l’utilisation est surtout commerciale.
L’utilisation de
ces biotechnologies va ouvrir un tout premier débat dans l’espace public, celui
de son usage sur l’embryon avec le cas connu de la Fécondation In Vitro (FIV).
On parle de biotechnologies rouges pour qualifier les biotechnologies en
rapport avec la santé, de biotechnologies vertes lorsqu’elles ont une utilité
dans l’agriculture.
En 1978, les couples stériles et
hypofertiles souhaitent avoir accès à un enfant. Au départ, la technique est
celle de l’insémination artificielle, on insère les spermatozoïdes directement
sur les ovaires, que ce soit ceux du mari ou d’un autre homme. Le problème posé
est alors de savoir si l’on doit ou non donner le nom du père biologique des
enfants. A coté de ce débat, une nouvelle technique plus radicale consiste à
faire rencontrer les deux gamètes dans une éprouvette, on laisse agir, puis on
réintroduit la cellule embryonnaire dans le corps de la femme. En 1978, c’est la naissance de Louise Brown aux USA puis d’Amandine en 1982
en France. Le laboratoire fonctionne de
manière totalement hermétique puisque des années durant, le laboratoire a
essayé la FIV en tuant plusieurs embryons et sans contrôle, c’est là le cœur du
problème.