samedi 1 décembre 2012

Théorie des RI 29 - 11 (cours 3)

Pour Machiavel, le Prince doit savoir être loup ou renard selon les circonstances.
Rien n'est dit du lion en revanche
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L’enseignement de Machiavel n’est pas machiavélique comme on l’entend aujourd’hui. C’est avant tout un enseignement politique qui est amoral et non pas immoral. Selon lui, la morale ne permet pas de comprendre le phénomène politique et les relations internationales. A cette époque, l’Italie n’existe pas encore, il n’y a pas de dissociation entre la sphère interne et la sphère externe en politique. La question pertinente est celle de l’acquisition du pouvoir et de sa conservation face à des évènements externes. Les Cités-États de l’époque, comme Florence, doivent sans cesse défendre leur pouvoir contre des possibilités d’agressions externes. La question de Machiavel va alors être plus complexe qu’on l’a conservé aujourd’hui.
Machiavel a donné l’adjectif « machiavélique » et est résumé dans l’expression « la fin justifie les moyens ». C’est quelqu’un qui est prêt à mentir pour atteindre ses objectifs. Un personnage machiavélique c’est Iago dans Othello de Shakespeare, puisque c’est le serviteur d’Othello et qu’il est prêt à mentir et faire preuve de duplicité pour atteindre ses intérêts particuliers. Peu lui importe les moyens, il se définit lui-même comme « ce qu’il n’est pas », il ment tout le temps et n’est que ce qu’il ne dit pas, tant il ment. Mais Iago n’est que machiavélique et non pas machiavélien.
Etre machiavélien, c’est respecter l’enseignement de Machiavel, faire fi de la morale quitte à mentir par moment. Le Prince par son action politique ne vise pas juste son intérêt particulier mais par tous les moyens qu’il emploie, il vise l’intérêt commun et universel. En effet, Machiavel vise derrière son ouvrage un maintien de la démocratie au travers de l’image du Prince. C’est la contradiction de Machiavel : comment peut-on en temps que Prince assurer son intérêt mais surtout celui de ses sujets ?
Machiavel est de loin l’auteur politique qui définit le mieux les relations de pouvoir : il y a des gouvernants et des gouvernés. Tout cela est bien loin de l’ordre moral et religieux. Quiconque cherche à expliquer le phénomène politique par l’aspect religieux et moral, est dans l’erreur. Le politique est un phénomène en soit. Machiavel écrit que le domaine politique est un domaine en soi. Du coup en quoi être dans la servitude d’un Prince, est dans notre intérêt ? Machiavel produit sa réflexion à partir du contexte de l’époque. Quentin Skinner dans Les fondements de la pensée politique moderne résume ce contexte. Machiavel avant d’écrire Le Prince était diplomate pour le Prince de Florence et fut envoyé à la cour de France. Les diplomates de l’époque avaient une plus grande autonomie à cette époque. Les Florentins avaient alors une alliance avec les Français pour se défendre contre les Byzantins, mais la France était molle à réagir et Machiavel fut envoyé à la cour de France pour, par la rhétorique, aller présenter à la France les intérêts de protéger la puissance florentine. Machiavel va alors découvrir que la royauté française n’a que faire des propos florentins mais se soucie de savoir jusqu’où la France peut s’appuyer sur cette ville en déliquescence. Les rapports de pouvoir ne dépendent que de la situation concrète et des intérêts de chacun. Ainsi Machiavel réalise que des petites Cités-États comme Florence ou Pise, ne peuvent compter pour rien. Il n’y a pas d’État de droits dans les relations internationales, le roi de France n’a aucune règle morale, il est totalement cynique et ne réfléchit qu’à savoir comment maximiser ses avantages et minimiser ses risques. Les Français n’avaient rien à faire de Florence dés lors qu’elle ne leur apportait rien. Aujourd’hui aucun État ne pourrait être humilié de la sorte. Il y a une protection avec les institutions internationales, le droit international et l’opinion publique internationale qui publiciserait le mépris d’un pays vis-à-vis d’un autre pour critiquer une puissance qui agirait de cette manière. Mais sous Machiavel, cela est impossible. Machiavel a donc à ce moment là une révélation, liée à sa pratique. Il n’a pas réussit à convaincre de la grandeur présumée de Florence à la cour française. Cette révélation va le pousser dans son projet d’écriture du Prince.
Machiavel va théoriser le fait qu’il existe deux chefs d’État : le Prince qui agit selon la virtu et celui qui agit pour atteindre ses fins uniquement. Or le second type de chef ne maximisera jamais totalement ses chances par son attitude éloignée de la virtu. Machiavel nous apprend qu’il existe une logique de la force, c'est-à-dire que cette force peut être utilisée de manière destructurante mais cela est un mauvais usage, on peut s’en servir aussi de manière structurante. Dans Le Prince, il est beaucoup plus simple d’acquérir et de conserver le pouvoir quand les sujets sont dans un état de crainte et de peur que lorsque l’on maintien ses sujets dans un État d’amour et d’amitié. En effet, selon Machiavel, amour et amitié sont des passions mouvantes pouvant disparaître à tout moment, ce qui revient à prendre appui sur un château de carte. La crainte en revanche vous tient. Le Prince peut alors verrouiller le système en empêchant ses ennemis d’imaginer le renverser.
Pourtant les propos de Machiavel sont encore plus nuancés que cela, il existe une fécondité du mal. En prenant l’exemple de César Borgia, il explique comment le Prince par excellence selon lui, a su s’imposer à la population en se faisant craindre et en se faisant aimer en même temps. Ainsi le Prince pour conserver son intérêt particulier a recours à la force. Voyant un désordre en Romagne, dommageable à la population César Borgia profite de la désunion pour imposer un retour à l’ordre. La paix rétablie ne repose que sur un pouvoir politique spécifique et non pas sur une autorité religieuse (et donc morale). Ce retour à l’ordre passe par un recours à la force. Le Prince se présente comme un défenseur de la démocratie, il utilise un intermédiaire pour réprimer de manière sanglante les désordres en Romagne. Du coup, le Prince n’apparait pas comme l’instigateur direct de la violence. Suite à la paix rétablie par la violence, le Prince veut contrebalancer l’inimitié provoquée par son intermédiaire en instaurant des tribunaux locaux. En utilisant la violence, le Prince veut maintenir la loyauté mais celle-ci ne peut pas reposer uniquement sur cette violence. Le Prince doit s’appuyer sur le peuple pour assoir son pouvoir. Pour cela, le Prince doit apparaître comme un démocrate qui prend en compte les intérêts du peuple, il va donc rediriger sa violence de manière féroce vers son lieutenant. Le Prince en tuant publiquement son lieutenant maintient son aspect de violence et de férocité mais contente d’une certaine manière le peuple. Pour Machiavel, le pouvoir s’acquière et se maintient toujours dans une démonstration de force vis-à-vis du peuple mais en même temps, de subtilité.
Machiavel est tout de même un démocrate puisqu’il est le premier philosophe à parler des intérêts et de la satisfaction du peuple. Le Prince est comptable de sa politique dans le sens où il a une responsabilité politique vis-à-vis de son peuple et de la démocratie. Dans un contexte féodal, cela est d’une certaine innovation.

Ce qui va apparaître comme prégnant, c’est l’idée qu’on va avoir un ordre international établi dans lequel Hobbes explique en quoi consiste l’hypothèse de l’anarchie sauf qu’il n’utilise pas  ce terme mais parle en revanche d’un « état de nature ». Dans Le Léviathan, Hobbes à recours aux relations entre les États pour caractériser cet état de nature. L’état de nature est caractérisé par le fait qu’il se définit négativement, c’est lorsqu’il n’y a pas d’État de droit. Mais l’État de nature  n’est pas un synonyme de guerre effective. C’est une guerre avec une forme plus implicite, c’est avant tout une prédisposition des acteurs qui est avérée à aller dans le sens d’une guerre effective. L’état de nature c’est quand les individus ont plutôt tendance à entretenir des rapports de méfiance et parfois d’inimitié envers les autres individus. Par nature l’homme se méfie de son prochain dés qu’il ne dispose pas d’assez d’informations sur celui-ci.

Kennes Waltz le représentant du néoréalisme reprend Hobbes pour se différencier de Morgenthau. Il conçoit la prédisposition de méfiance de l’homme vis-à-vis d’autrui et souligne les erreurs de Morgenthau. Ce dernier pensait que les individus comme les États étaient fondamentalement égoïstes et méchants, préférant instinctivement agresser les autres États par ce qu’il nomme un « instinct de vie et de domination ». Cette tendance est conforme à la nature des États, c’est ce qu’on nomme le réalisme offensif. Waltz propose un néoréalisme défensif. L’égoïsme de Waltz est plus nuancé, il reprend la métaphore du chasseur primitif exposée par Rousseau. Les acteurs étatiques cherchent toujours à maximiser leurs intérêts particuliers, mais ils vont d’abord privilégier la coopération pour atteindre ce but et ce n’est qu’en dernier lieu qu’ils privilégient les agressions et le désir égoïsme. Chez Rousseau, à l’État de nature, l’homme est seul. Mais pour réaliser un bien supérieur plus important dans le long terme, l’homme favorise la coopération. Cependant dés qu’une occasion se présente d’avoir un bien à court terme inférieur, l’homme préfère s’en saisir que de coopérer. Ainsi pour Waltz, les individus ne peuvent jamais être véritablement assurés d’acquérir ces biens supérieurs à long terme, du coup, ils favorisent les biens inférieurs à court terme. Par définition, les États vont donc toujours entrer dans des rapports de confrontation égoïstes, en dépit d’une politique de sociabilité et de coopération qu’ils développent dans un premier temps. Les États veulent minimiser les coûts.

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