La Proton malaisienne
Si l’on a une
structure de population équitablement répartie, on a une grosse masse de classe
moyenne. En conséquence, selon les économistes, cela peut être un ressort pour
des biens de consommation standardisés, permettant ainsi de stimuler l’offre.
C’est la théorie du Big Push, de Roseinstein-Roday. Derrière cela, on voit que
derrière une forte croissance, il faut qu’il y ait une activité économique
dynamique et industrielle.
L’autre aspect dans
les conditions initiales c’est le niveau de capital humain. Si celui-ci est élevé au départ, alors la capacité d’absorption
des technologies étrangères est élevée. Les entreprises étrangères
viennent sur le territoire, avec des technologies généralement supérieures à
celles du pays. Cela sera bénéfique à l’économie si le pays est capable de
tirer des enseignements de ces entreprises. Or plus le capital humain est
élevé, plus on a de chances pour que cette technologie soit absorbée. On
entrerait dans une spirale vertueuse en quelque sorte.
Enfin, si on a une
situation de départ à peu près égalitaire, alors la société sera plus stable. Ainsi dans les dépenses
publiques, il sera moins question d’investir dans la sécurité. Donc autant de
ressources qui pourront être réinvesties dans l’économie.
Ces trois
conditions n’expliquent pas le développement, mais peuvent expliquer la
rapidité de celui-ci.
III.
Les différents
développements de la première génération
Dans la réflexion
globale sur le miracle asiatique, on tend à dire que les économies ont suivi la
même voix et se serait ainsi démarquées des autres. Les économistes savent
qu’il n’y a pas qu’un modèle mais tendent à mettre en avant uniquement les
similitudes des modèles, plus que les différences. Si l’on est convaincu du
libéralisme des économies asiatiques, alors il n’y a pas de spécificités de ce
modèle, ce serait une version un peu différente du modèle anglo-saxon. Si l’on
estime qu’au contraire l’étatisme est prégnant, alors il y a une spécificité
asiatique qui se résume surtout à la notion de « L’État
développeur ». L’idée la plus
probable est qu’il n’y a pas un seul modèle, il y a certes des points communs
mais surtout des différences qui empêchent de constituer un modèle en
particulier en regardant le contexte historique.
1.
Hong-Kong
Hong-Kong part d’un
niveau de revenu très riche au départ.
Il s’agit d’un port commercial très important et dont le rôle d’entrepôt était
essentiel. L’autre aspect positif qui en découle, c’est qu’il y a de grandes
sociétés productives sur place. Dans la même idée, on a des infrastructures
commerciales et financières qui faciliteront les choses par la suite. Ultime
point, Hong-Kong est proche de la Chine et donc on a un nombre important
d’investisseurs chinois qui s’y concentre.
L’économie de la
ville est caractérisée par le libéralisme. Et tout ce qui n’est pas interdit
est permis dans l’esprit des habitants. Le
laisser-faire, le libre-échange et la stratégie de porte ouverte sont la règle.
Le développement de Hong-kong va s’appuyer sur la production légère et assez
peu sophistiquée de l’industrie légère. Elle est donc tournée vers
l’exportation plus que vers la consommation intérieure. En revanche, la place
de l’État est minime puisque le laisser-faire reste la règle. L’État intervient de manière très limitée
et toujours indirectement (encouragement au développement des ressources
humaines, …). L’État se contente de créer les bonnes conditions pour les
entreprises mais donc jamais directement. Evidemment, il s’agit de développer
des technologies peu gourmandes en effort industriel. Ainsi Hong-Kong n’aura
jamais de réel développement technologique qui augmenterait les coûts de
production et de l’immobilier. Mais rapidement, les entreprises peuvent se
redéployer vers les activités de service et pour les industries lourdes, elles
peuvent s’implanter sur le territoire chinois.
Le
cas de Hong-Kong est donc très libéral, mais reste de loin le plus particulier
de tous. Elle n’a rejoint la Chine qu’en 1997,
mais possède toujours son administration, ses lois et sa monnaie propre. Idem
évidemment pour le système économique.
2.
Singapour
Comme Hong-Kong,
c’est une ancienne colonie britannique avec un niveau de revenus plus élevé que
le reste de la région.
Il s’agit alors d’une plaque tournante avec un port très actif. En revanche, ce
n’est plus une colonie britannique puisque Singapour devient indépendante après
la Seconde Guerre Mondiale. Au
démarrage, on décide de rapprocher Singapour du territoire logique de son
appartenance : la Malaisie. Est donc créé au début
des années 1960 est créée la Malaya, la Fédération de Malaisie qui
réunit Singapour, la péninsule malaise et deux territoires au Nord de
Bornéo : le Sabah et le Sarawak. Le but de ce découpage était de respecter
des questions ethniques avec 80% de chinois à Singapour. Pour éviter que cela
ne serve que des intérêts chinois, on a rajouté des régions avec des Malais de
souche qui empêcheront que la population chinoise soit majoritaire dans cette
zone. Mais cette entente n’a pas duré.
Dés 1965, Singapour fait sécession et
bénéficie des atouts hérités de sa période de colonie britannique.
Par opposition à
Hong-Kong, à Singapour, tout ce qui n’est pas expressément permis est interdit. Cela tient encore aux conditions initiales de départ. L’État doit
intervenir d’entrée de jeu pour stabiliser les relations sociales :
conditions d’emplois, logements sociaux, … Il fallait répondre aux difficultés
économiques de l’époque avec un fort taux de chômage. Tout de suite est mis en
place un conseil de développement économique qui doit assurer la stabilité
économique et politique. Le maître des lieux va rapidement émerger avec Lee Kwan Yew, aux commandes du parti dominant de
Singapour et donc de l’économie du pays : People’s Action Party. (PAP).
C’est le parti unique qui tient le pays depuis sa naissance et qui perdure
aujourd’hui. L’ensemble de la stratégie économique sera définie et imposée par
le haut.
Dans le cas de
Singapour, l’interventionnisme est très lourd, la stratégie économique est
claire : résister et permettre la survie de Singapour face à la Malaisie. Une banque de développement est
créée pour assurer des promotions industrielles. En termes d’orientation des
activités économiques, Singapour va
utiliser le système de l’ISI de manière très limitée. Le pays va cependant
aussi s’assurer des Investissements Directs Etrangers (IDE) qui permettent
aussi l’implantation d’entreprises étrangères assurant l’arrivée de
technologies étrangères. Pour assurer leur bonne volonté, les autorités de
Singapour on interdit les syndicats. La raison est aussi économique puisque
cela permet de développer l’économie tout en faisant face à une éventuelle
concurrence de Malaisie.
L’État va aussi
mettre en place des entreprises publiques affiliée à l’État mais qui en sont
assez indépendantes.
Cela est créé pour permettre le développement de certains systèmes d’activités
jugés porteurs pour l’activité du pays. Les liens avec l’État sont forts mais
pas directs. Ces entreprises n’ont donc pas non plus des privilèges
exorbitants.
En termes
d’organisation, Singapour va suivre un peu la logique de Hong-Kong en partant
dans l’industrie légère puis dans les services. Là encore, l’emplacement de
Singapour lui assurera une forte activité portuaire ce qui en fait un des plus
grands ports du monde.
Avec
le temps qui passe, Singapour perd un peu de l’influence de l’État. Mais cette
diminution de l’État est assez lente tout en accueillant des investissements
étrangers.
3.
La Corée du Sud
La Corée du Sud est
un exemple classique de la notion d’État développeur. Dans le cas de la Corée
les interventions publiques furent prégnantes : bien organisées, bien choisies et ayant eut
lieu très tôt, des plans quinquennaux l’ont dirigé. Ce sont des plans
indicatifs plus que des plans durs à la soviétique. En plus de fixer des
orientations, il y a des moyens fournis aux entreprises. Pour mener à bien
cette stratégie, très tôt en mis en place un conseil qui doit fixer le cap et
les objectifs économiques tout en stoppant les secteurs inutiles.
Les interventions
de l’État passeront en grande partie par le secteur financier. Il va commencer par nationaliser
les banques commerciales ce qui lui permet de choisir qui sera financé et qui
ne le sera pas. L’État choisit donc les priorités.
Le développement
économique de la Corée va véritablement s’amorcer en 1961
à l’issu du coup d’État de Park Chung-Hee (dont la fille Park Gyenn-He fut élue présidente de Corée du Sud
le 19 décembre 2012). Assassiné en 1979, il a tout de même lancé le développement
économique de ce pays en dépit d’action assez dictatoriales de sa part. Le pays
se servira de sa main d’œuvre compétitive et bon marché pour se lancer d’abord
dans les activités d’habillement pour ensuite se spécialiser dans d’autres
secteurs.
Un peu de stratégie
d’ISI sera mise en place, mais rapidement elle sera abandonnée pour se diriger
vers son opposé : une promotion des exportations. Le gouvernement fixe à chaque
fois les secteurs de développement : industrie lourde et industrie
chimique seront mit en avant. Ils sont spécialisés dans les chantiers navals et
dans la sidérurgie coréenne.
Clairement le
système de développement économique est inspiré du modèle japonais. Mais des
techniques libérales seront visibles dedans. En effet, les aides financières
fournies aux entreprises ne seront soutenues par le gouvernement que si les
entreprises sont compétitives sur le marché, dans le cas contraire, elles sont
lâchées.
De
même, le résultat de cette politique est l’apparition de grands groupes
effectivement compétitifs mais qui effacent les petites entreprises
potentiellement compétitives. C’est l’exemple de Samsung ou de LG. C’est ce
qu’on nomme les chaebols, de gros conglomérats. Mais cette politique tend à
faire reposer l’économie de la Corée sur ses gros groupes au risque que le
reste de l’économie soit très fragile.
Un autre détail
non-négligeable pour la Corée, c’est l’aide américaine qui lui a permis
d’amorcer la pompe.
Du coup, l’expérience coréenne est difficile à reproduire ailleurs. Mais
contrairement à Singapour, la Corée n’a jamais été friande d’IDE. Elle a donc
été très sélective dans les investissements étrangers en choisissant ceux qui
étaient porteurs de technologies et qui n’entraient pas en concurrence avec des
entreprises nationales. La Corée a donc
plutôt emprunté, laissant les IDE s’entasser dans des Zones Economiques
Spéciales (ZES) et très surveillées.
4.
Taïwan
Dans ce pays, les
autorités ont une idée principale en tête, la concurrence de la Chine.
L’objectif de développement économique va s’imposer rapidement. Comme dans le cas de la Corée,
les banques vont être nationalisées mais pas vraiment comme une courroie de
transmission avec les entreprises. L’importance
de l’État n’est donc pas négligeable puisqu’on a une règlementation sur le
marché du travail, … La structure industrielle sera totalement différente de
celle de l’Amérique du Sud. Du fait de l’histoire, on a une structure ethnique
compliquée : il y a des Taïwanais d’origine et d’autres venus avec le
Guomintang. Ce mélange de locaux et d’expatriés
chinois fait que le système politique est aux mains du Guomintang mais le
système économique privé est aux mains des locaux. Du coup, le
développement économique sera plus facile pour les entreprises du Guomintang ou
affiliée à celui-ci. En conséquence, les entreprises particulièrement privées
seront alimentées par des fonds informels, des tontines locales.
En termes de
stratégie commerciale, on est proche de Singapour et de la Corée du Sud,
d’abord du protectionnisme et un système d’ISI, qui sera vite transformé en
système d’exportation.
Concernant les IDE,
Taïwan a utilisé la technique coréenne des ZES. En revanche, l’île a été
beaucoup moins sélective que la Corée sur les IDE. Du coup, les IDE ont largement
pris le pas sur les prêts. C’est aussi l’occasion de récupérer des technologies
auprès des entreprises sur place.
La
création de ??? a permis de décider
quelles seraient les secteurs développé.
Taïwan est donc à
l’instar de la Corée l’exemple typique de l’État développeur.
Comme les trois
autres pays, il y a des difficultés de départ qui vont inspirer la stratégie
économique de départ. De plus, initialement, il n’y a pas d’atouts économiques
pour ces pays. Les économies se sont développées par la nécessité. On peut
aussi noter leur petite taille
des pays ont poussé les économies à agir dans le sens des exportations puisque
le marché intérieur restait par trop limité. Enfin, dans les 4 cas, une petite
cellule fut instaurée et a eu en charge la stratégie industrielle et de
développement. Ce sont là les points de convergence entre les quatre pays.
IV.
Les différents
développements de la seconde génération
1.
La Malaisie
Au départ, la
Malaisie possède une économie agricole avec plusieurs ressources qu’elle
exploite, notamment la culture de l’hévéa pour le caoutchouc et l’exploitation
de l’étain. C’est donc le premier de nos pays qui possède de réelles ressources
naturelles.
De plus, il y a une
situation ethnique particulière. Une majorité de la population est malaise de
souche, les Buniputras
(70% de la population), et dans la
population restante, on trouve des chinois (25%) et le reste essentiellement des Indiens. Le pouvoir politique est
aux mains des Buniputras et le pouvoir économique est aux mains des Chinois. Voulant
reprendre leur critère économique en main, les Buniputras vont tenter de
récupérer ce pouvoir économique. Les tensions vont s’exacerber et fin des années 1960, on a des émeutes ethniques.
Les pouvoirs publics vont trouver une
solution la Nouvelle Economie Politique (NEP). L’objectif est de donner
plus d’importance économique aux Buniputras, et on vise en 1990 que 30% du capital industriel malais tombe
dans les mains de cette ethnie majoritaire. Cette politique économique va
imprégner toutes les mesures économiques de cette époque.
On
va donc créer des entreprises publiques qui seront ensuite privatisées et
vendues à des Buniputras. On créer donc de toutes pièces de grandes entreprises
publiques durant cette période. Du coup,
le gouvernement est donc très impliqué dans la conduite de la stratégie
économique. Cette création est favorisée par l’exploitation des ressources
naturelles. Ces ressources conduisent donc à une industrialisation. L’État va donc
intervenir de manière insistante envers l’industrie lourde, notamment en
développant une industrie automobile internationale dont le fleuron est la
voiture Proton. On a donc dans l’idée d’avoir une voiture nationale qui demande
d’être particulièrement protectionniste pour éviter la concurrence des voitures
étrangères. Cette stratégie industrielle semble assez mal comprise :
développer une voiture nationale dans un petit pays quand des concurrents
énormes sont partout dans le monde. On
voit donc le volontarisme et l’interventionnisme du pays, même si n’est pas
toujours très bien pensé. Le représentant de cette économie c’est le Docteur M, Mr.
Mahathir.
Un autre aspect de
la Malaisie fut celui d’avoir une économie reposant sur les IDE par la création
de ZES dont la
première se fit sur la péninsule de Paylang (???) avec pour axe principal
l’installation d’entreprises spécialisées dans l’électronique (Texas
instrument) qu’ils jugeaient comme axe porteur. On a donc un accueil favorable
aux IDE tout en ayant une vision claire et d’avenir dans certains secteurs. Ce qui a compliqué l’ouverture aux IDE fut
la NEP. Les investisseurs étrangers devaient à chaque fois faire des joint ventures avec des Buniputras.
Après l’automobile
qui fut un certain échec, la Malaisie a encouragé d’autres activités :
l’électronique puis dans les années 1990 avec
le « super couloir multimédia ». De nouveau imposé par les pouvoirs publics, ce
projet doit relier Kuala Lumpur à l’aéroport international et y sont
accueillies toutes les entreprises de multimédia. Le résultat de cette volonté
reste encore à démontrer, mais on voit bien de nouveau le volontarisme net.
Enfin, la Malaisie
a cherché à développer assez régulièrement ses ressources, passant de l’hévéa aux palmiers
à huile, moins exigeant en main d’œuvre. De plus, elle transforme la Malaisie
transforme elle-même son huile de palme. Elle a donc toujours cet aspect
volontariste avec des politiques qui ont une vision pour le pays que les
réalisations soient ou non un succès.
2.
L’Indonésie
Tout comme la
Malaisie, l’Indonésie a des ressources dans son sol essentiellement
pétrolières. Cette rente pétrolière fut réinvestie pour développer le reste de
l’activité industrielle notamment l’industrie manufacturière. C’est surtout
l’industrie légère qui en a bénéficié avec le textile et l’habillement.
Mais d’autres
aspects furent bien plus contestables. L’Indonésie a aussi voulu mettre en
place une industrie lourde
dans l’aéronautique qui répondait à des besoins territoriaux puisque
l’Indonésie est composée de plus de 17 000 îles. Ce développement fut mis
en place mais est tout aussi contestable que le cas malaisien pour
l’automobile. Cette politique fut très couteuse et les bénéfices restent
limités. Par la suite, l’Indonésie a tenté de développer aussi une industrie
automobile. Lancé dans le milieu des années 1990,
cela prenait place dans un mauvais contexte : de nombreuses industries
automobiles internationales existaient déjà, avec aussi des concurrents
asiatiques (Corée, …). La voiture devait s’appeler Timor en plein conflit entre
Indonésie et Timor-Leste. La politique devait surtout satisfaire des intérêts
personnels (le fils de président semble-t-il). Le gouvernement semble donc décider de la politique économique et le
gouvernement se résumait depuis 1968 au Général Suharto.
Pour le reste, la
politique économique et industrielle reste un peu limitée.
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