mardi 29 janvier 2013

Asie 29 - 01 (cours 3)

 La Proton malaisienne



Si l’on a une structure de population équitablement répartie, on a une grosse masse de classe moyenne. En conséquence, selon les économistes, cela peut être un ressort pour des biens de consommation standardisés, permettant ainsi de stimuler l’offre. C’est la théorie du Big Push, de Roseinstein-Roday. Derrière cela, on voit que derrière une forte croissance, il faut qu’il y ait une activité économique dynamique et industrielle.
L’autre aspect dans les conditions initiales c’est le niveau de capital humain. Si celui-ci est élevé au départ, alors la capacité d’absorption des technologies étrangères est élevée. Les entreprises étrangères viennent sur le territoire, avec des technologies généralement supérieures à celles du pays. Cela sera bénéfique à l’économie si le pays est capable de tirer des enseignements de ces entreprises. Or plus le capital humain est élevé, plus on a de chances pour que cette technologie soit absorbée. On entrerait dans une spirale vertueuse en quelque sorte.
Enfin, si on a une situation de départ à peu près égalitaire, alors la société sera plus stable. Ainsi dans les dépenses publiques, il sera moins question d’investir dans la sécurité. Donc autant de ressources qui pourront être réinvesties dans l’économie.
Ces trois conditions n’expliquent pas le développement, mais peuvent expliquer la rapidité de celui-ci.






III.                   Les différents développements de la première génération

Dans la réflexion globale sur le miracle asiatique, on tend à dire que les économies ont suivi la même voix et se serait ainsi démarquées des autres. Les économistes savent qu’il n’y a pas qu’un modèle mais tendent à mettre en avant uniquement les similitudes des modèles, plus que les différences. Si l’on est convaincu du libéralisme des économies asiatiques, alors il n’y a pas de spécificités de ce modèle, ce serait une version un peu différente du modèle anglo-saxon. Si l’on estime qu’au contraire l’étatisme est prégnant, alors il y a une spécificité asiatique qui se résume surtout à la notion de « L’État développeur ». L’idée la plus probable est qu’il n’y a pas un seul modèle, il y a certes des points communs mais surtout des différences qui empêchent de constituer un modèle en particulier en regardant le contexte historique.

1.      Hong-Kong

Hong-Kong part d’un niveau de revenu très riche au départ. Il s’agit d’un port commercial très important et dont le rôle d’entrepôt était essentiel. L’autre aspect positif qui en découle, c’est qu’il y a de grandes sociétés productives sur place. Dans la même idée, on a des infrastructures commerciales et financières qui faciliteront les choses par la suite. Ultime point, Hong-Kong est proche de la Chine et donc on a un nombre important d’investisseurs chinois qui s’y concentre.

L’économie de la ville est caractérisée par le libéralisme. Et tout ce qui n’est pas interdit est permis dans l’esprit des habitants. Le laisser-faire, le libre-échange et la stratégie de porte ouverte sont la règle. Le développement de Hong-kong va s’appuyer sur la production légère et assez peu sophistiquée de l’industrie légère. Elle est donc tournée vers l’exportation plus que vers la consommation intérieure. En revanche, la place de l’État est minime puisque le laisser-faire reste la règle. L’État intervient de manière très limitée et toujours indirectement (encouragement au développement des ressources humaines, …). L’État se contente de créer les bonnes conditions pour les entreprises mais donc jamais directement. Evidemment, il s’agit de développer des technologies peu gourmandes en effort industriel. Ainsi Hong-Kong n’aura jamais de réel développement technologique qui augmenterait les coûts de production et de l’immobilier. Mais rapidement, les entreprises peuvent se redéployer vers les activités de service et pour les industries lourdes, elles peuvent s’implanter sur le territoire chinois.

Le cas de Hong-Kong est donc très libéral, mais reste de loin le plus particulier de tous. Elle n’a rejoint la Chine qu’en 1997, mais possède toujours son administration, ses lois et sa monnaie propre. Idem évidemment pour le système économique.

2.      Singapour

Comme Hong-Kong, c’est une ancienne colonie britannique avec un niveau de revenus plus élevé que le reste de la région. Il s’agit alors d’une plaque tournante avec un port très actif. En revanche, ce n’est plus une colonie britannique puisque Singapour devient indépendante après la Seconde Guerre Mondiale. Au démarrage, on décide de rapprocher Singapour du territoire logique de son appartenance : la Malaisie. Est donc créé au début des années 1960 est créée la Malaya, la Fédération de Malaisie qui réunit Singapour, la péninsule malaise et deux territoires au Nord de Bornéo : le Sabah et le Sarawak. Le but de ce découpage était de respecter des questions ethniques avec 80% de chinois à Singapour. Pour éviter que cela ne serve que des intérêts chinois, on a rajouté des régions avec des Malais de souche qui empêcheront que la population chinoise soit majoritaire dans cette zone. Mais cette entente n’a pas duré. Dés 1965, Singapour fait sécession et bénéficie des atouts hérités de sa période de colonie britannique.

Par opposition à Hong-Kong, à Singapour, tout ce qui n’est pas expressément permis est interdit. Cela tient encore aux conditions initiales de départ. L’État doit intervenir d’entrée de jeu pour stabiliser les relations sociales : conditions d’emplois, logements sociaux, … Il fallait répondre aux difficultés économiques de l’époque avec un fort taux de chômage. Tout de suite est mis en place un conseil de développement économique qui doit assurer la stabilité économique et politique. Le maître des lieux va rapidement émerger avec Lee Kwan Yew, aux commandes du parti dominant de Singapour et donc de l’économie du pays : People’s Action Party. (PAP). C’est le parti unique qui tient le pays depuis sa naissance et qui perdure aujourd’hui. L’ensemble de la stratégie économique sera définie et imposée par le haut.

Dans le cas de Singapour, l’interventionnisme est très lourd, la stratégie économique est claire : résister et permettre la survie de Singapour face à la Malaisie. Une banque de développement est créée pour assurer des promotions industrielles. En termes d’orientation des activités économiques, Singapour va utiliser le système de l’ISI de manière très limitée. Le pays va cependant aussi s’assurer des Investissements Directs Etrangers (IDE) qui permettent aussi l’implantation d’entreprises étrangères assurant l’arrivée de technologies étrangères. Pour assurer leur bonne volonté, les autorités de Singapour on interdit les syndicats. La raison est aussi économique puisque cela permet de développer l’économie tout en faisant face à une éventuelle concurrence de Malaisie.
L’État va aussi mettre en place des entreprises publiques affiliée à l’État mais qui en sont assez indépendantes. Cela est créé pour permettre le développement de certains systèmes d’activités jugés porteurs pour l’activité du pays. Les liens avec l’État sont forts mais pas directs. Ces entreprises n’ont donc pas non plus des privilèges exorbitants.

En termes d’organisation, Singapour va suivre un peu la logique de Hong-Kong en partant dans l’industrie légère puis dans les services. Là encore, l’emplacement de Singapour lui assurera une forte activité portuaire ce qui en fait un des plus grands ports du monde.

Avec le temps qui passe, Singapour perd un peu de l’influence de l’État. Mais cette diminution de l’État est assez lente tout en accueillant des investissements étrangers.

3.      La Corée du Sud

La Corée du Sud est un exemple classique de la notion d’État développeur. Dans le cas de la Corée les interventions publiques furent prégnantes : bien organisées, bien choisies et ayant eut lieu très tôt, des plans quinquennaux l’ont dirigé. Ce sont des plans indicatifs plus que des plans durs à la soviétique. En plus de fixer des orientations, il y a des moyens fournis aux entreprises. Pour mener à bien cette stratégie, très tôt en mis en place un conseil qui doit fixer le cap et les objectifs économiques tout en stoppant les secteurs inutiles.
Les interventions de l’État passeront en grande partie par le secteur financier. Il va commencer par nationaliser les banques commerciales ce qui lui permet de choisir qui sera financé et qui ne le sera pas. L’État choisit donc les priorités.

Le développement économique de la Corée va véritablement s’amorcer en 1961 à l’issu du coup d’État de Park Chung-Hee (dont la fille Park Gyenn-He fut élue présidente de Corée du Sud le 19 décembre 2012). Assassiné en 1979, il a tout de même lancé le développement économique de ce pays en dépit d’action assez dictatoriales de sa part. Le pays se servira de sa main d’œuvre compétitive et bon marché pour se lancer d’abord dans les activités d’habillement pour ensuite se spécialiser dans d’autres secteurs.
Un peu de stratégie d’ISI sera mise en place, mais rapidement elle sera abandonnée pour se diriger vers son opposé : une promotion des exportations. Le gouvernement fixe à chaque fois les secteurs de développement : industrie lourde et industrie chimique seront mit en avant. Ils sont spécialisés dans les chantiers navals et dans la sidérurgie coréenne.

Clairement le système de développement économique est inspiré du modèle japonais. Mais des techniques libérales seront visibles dedans. En effet, les aides financières fournies aux entreprises ne seront soutenues par le gouvernement que si les entreprises sont compétitives sur le marché, dans le cas contraire, elles sont lâchées.
De même, le résultat de cette politique est l’apparition de grands groupes effectivement compétitifs mais qui effacent les petites entreprises potentiellement compétitives. C’est l’exemple de Samsung ou de LG. C’est ce qu’on nomme les chaebols, de gros conglomérats. Mais cette politique tend à faire reposer l’économie de la Corée sur ses gros groupes au risque que le reste de l’économie soit très fragile.

Un autre détail non-négligeable pour la Corée, c’est l’aide américaine qui lui a permis d’amorcer la pompe. Du coup, l’expérience coréenne est difficile à reproduire ailleurs. Mais contrairement à Singapour, la Corée n’a jamais été friande d’IDE. Elle a donc été très sélective dans les investissements étrangers en choisissant ceux qui étaient porteurs de technologies et qui n’entraient pas en concurrence avec des entreprises nationales. La Corée a donc plutôt emprunté, laissant les IDE s’entasser dans des Zones Economiques Spéciales (ZES) et très surveillées.

4.      Taïwan

Dans ce pays, les autorités ont une idée principale en tête, la concurrence de la Chine. L’objectif de développement économique va s’imposer rapidement. Comme dans le cas de la Corée, les banques vont être nationalisées mais pas vraiment comme une courroie de transmission avec les entreprises. L’importance de l’État n’est donc pas négligeable puisqu’on a une règlementation sur le marché du travail, … La structure industrielle sera totalement différente de celle de l’Amérique du Sud. Du fait de l’histoire, on a une structure ethnique compliquée : il y a des Taïwanais d’origine et d’autres venus avec le Guomintang. Ce mélange de locaux et d’expatriés chinois fait que le système politique est aux mains du Guomintang mais le système économique privé est aux mains des locaux. Du coup, le développement économique sera plus facile pour les entreprises du Guomintang ou affiliée à celui-ci. En conséquence, les entreprises particulièrement privées seront alimentées par des fonds informels, des tontines locales.

En termes de stratégie commerciale, on est proche de Singapour et de la Corée du Sud, d’abord du protectionnisme et un système d’ISI, qui sera vite transformé en système d’exportation.

Concernant les IDE, Taïwan a utilisé la technique coréenne des ZES. En revanche, l’île a été beaucoup moins sélective que la Corée sur les IDE. Du coup, les IDE ont largement pris le pas sur les prêts. C’est aussi l’occasion de récupérer des technologies auprès des entreprises sur place.

La création de ??? a permis  de décider quelles seraient les secteurs développé.

Taïwan est donc à l’instar de la Corée l’exemple typique de l’État développeur.

Comme les trois autres pays, il y a des difficultés de départ qui vont inspirer la stratégie économique de départ. De plus, initialement, il n’y a pas d’atouts économiques pour ces pays. Les économies se sont développées par la nécessité. On peut aussi noter leur petite taille des pays ont poussé les économies à agir dans le sens des exportations puisque le marché intérieur restait par trop limité. Enfin, dans les 4 cas, une petite cellule fut instaurée et a eu en charge la stratégie industrielle et de développement. Ce sont là les points de convergence entre les quatre pays.


IV.                Les différents développements de la seconde génération

1.      La Malaisie

Au départ, la Malaisie possède une économie agricole avec plusieurs ressources qu’elle exploite, notamment la culture de l’hévéa pour le caoutchouc et l’exploitation de l’étain. C’est donc le premier de nos pays qui possède de réelles ressources naturelles.
De plus, il y a une situation ethnique particulière. Une majorité de la population est malaise de souche, les Buniputras (70% de la population), et dans la population restante, on trouve des chinois (25%) et le reste essentiellement des Indiens. Le pouvoir politique est aux mains des Buniputras et le pouvoir économique est aux mains des Chinois. Voulant reprendre leur critère économique en main, les Buniputras vont tenter de récupérer ce pouvoir économique. Les tensions vont s’exacerber et fin des années 1960, on a des émeutes ethniques. Les pouvoirs publics vont trouver une solution la Nouvelle Economie Politique (NEP). L’objectif est de donner plus d’importance économique aux Buniputras, et on vise en 1990 que 30% du capital industriel malais tombe dans les mains de cette ethnie majoritaire. Cette politique économique va imprégner toutes les mesures économiques de cette époque.
On va donc créer des entreprises publiques qui seront ensuite privatisées et vendues à des Buniputras. On créer donc de toutes pièces de grandes entreprises publiques durant cette période. Du coup, le gouvernement est donc très impliqué dans la conduite de la stratégie économique. Cette création est favorisée par l’exploitation des ressources naturelles. Ces ressources conduisent donc à une industrialisation. L’État va donc intervenir de manière insistante envers l’industrie lourde, notamment en développant une industrie automobile internationale dont le fleuron est la voiture Proton. On a donc dans l’idée d’avoir une voiture nationale qui demande d’être particulièrement protectionniste pour éviter la concurrence des voitures étrangères. Cette stratégie industrielle semble assez mal comprise : développer une voiture nationale dans un petit pays quand des concurrents énormes sont partout dans le monde. On voit donc le volontarisme et l’interventionnisme du pays, même si n’est pas toujours très bien pensé. Le représentant de cette économie c’est le Docteur M, Mr. Mahathir.

Un autre aspect de la Malaisie fut celui d’avoir une économie reposant sur les IDE par la création de ZES dont la première se fit sur la péninsule de Paylang (???) avec pour axe principal l’installation d’entreprises spécialisées dans l’électronique (Texas instrument) qu’ils jugeaient comme axe porteur. On a donc un accueil favorable aux IDE tout en ayant une vision claire et d’avenir dans certains secteurs. Ce qui a compliqué l’ouverture aux IDE fut la NEP. Les investisseurs étrangers devaient à chaque fois faire des joint ventures avec des Buniputras.

Après l’automobile qui fut un certain échec, la Malaisie a encouragé d’autres activités : l’électronique puis dans les années 1990 avec le « super couloir multimédia ». De nouveau imposé par les pouvoirs publics, ce projet doit relier Kuala Lumpur à l’aéroport international et y sont accueillies toutes les entreprises de multimédia. Le résultat de cette volonté reste encore à démontrer, mais on voit bien de nouveau le volontarisme net.

Enfin, la Malaisie a cherché à développer assez régulièrement ses ressources, passant de l’hévéa aux palmiers à huile, moins exigeant en main d’œuvre. De plus, elle transforme la Malaisie transforme elle-même son huile de palme. Elle a donc toujours cet aspect volontariste avec des politiques qui ont une vision pour le pays que les réalisations soient ou non un succès.

2.      L’Indonésie

Tout comme la Malaisie, l’Indonésie a des ressources dans son sol essentiellement pétrolières. Cette rente pétrolière fut réinvestie pour développer le reste de l’activité industrielle notamment l’industrie manufacturière. C’est surtout l’industrie légère qui en a bénéficié avec le textile et l’habillement.
Mais d’autres aspects furent bien plus contestables. L’Indonésie a aussi voulu mettre en place une industrie lourde dans l’aéronautique qui répondait à des besoins territoriaux puisque l’Indonésie est composée de plus de 17 000 îles. Ce développement fut mis en place mais est tout aussi contestable que le cas malaisien pour l’automobile. Cette politique fut très couteuse et les bénéfices restent limités. Par la suite, l’Indonésie a tenté de développer aussi une industrie automobile. Lancé dans le milieu des années 1990, cela prenait place dans un mauvais contexte : de nombreuses industries automobiles internationales existaient déjà, avec aussi des concurrents asiatiques (Corée, …). La voiture devait s’appeler Timor en plein conflit entre Indonésie et Timor-Leste. La politique devait surtout satisfaire des intérêts personnels (le fils de président semble-t-il). Le gouvernement semble donc décider de la politique économique et le gouvernement se résumait depuis 1968 au Général Suharto.
Pour le reste, la politique économique et industrielle reste un peu limitée.

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