mercredi 16 janvier 2013

Asie 16 - 11 (cours 1)


 Le vol d'oies sauvages inspire Kaname Atamatsu.



Le développement économique de l’Asie orientale


Il s’agit de parler de la montée en puissance économique de L’Asie, ce dont on parle tout le temps puisque cette région devient un acteur majeur et que la Chine passera probablement devant les USA par la suite. La question est donc de savoir comment cela s’est fait.
Il y a aussi des faiblesses dans cette économie comme l’a montré la crise de 1997 – 1998. Seule la Chine se démarque dans ce bloc et on l’étudiera séparément du reste de la région Asie. Si l’Asie est un acteur à part entière, elle-même se sent-elle unie économiquement ? Rien n’est moins sur. En cela, elle n’est pas forcément un acteur conscient de sa puissance, comme l’Union Européenne (UE).

I.                   Définir l’Asie orientale

Il s’agit uniquement de l’Asie de l’Est, on exclue en particulier tout le sous-continent indien (Inde et les pays en –stan). D’un point de vue économiste, on peut se focaliser sur l’espace géographique de l’Est du fait de similitudes dans les économies et une hausse économique forte dans cette région. On a une forme de structuration, une certaine logique économique dans cette zone. On peut diviser la région en deux grandes sous-parties :
·         L’Asie du Nord-Est : Chine, Japon, péninsule coréenne essentiellement. La Mongolie reste encore marginale si ce n’est du fait de sa richesse en ressources. Taïwan doit être pris en considération, de même que Hong-Kong qui était encore indépendante il y a quelques années.
·         L’Asie du Sud-Est : 10 pays assez habités et organisés dans l’ASEAN. On trouve le Myanmar (ex-Birmanie), la Thaïlande, le Laos, le Cambodge et le Vietnam pour la partie continentale. Dans la partie insulaire, on trouve la Malaisie, l’Indonésie, les Philippines, Singapour et Brunei. Tous ne seront pas évoqués dans le cours, notamment le Myanmar, le Laos, le Cambodge et le Vietnam, touts juste entrés dans la structure économique de cette région.


II.                Le miracle économique asiatique : les faits

1.      Pourquoi parler d’un miracle économique ?

Tout d’abord, évoquer un miracle souligne que les économies derrière cette expression ont du connaître des performances remarquables. Ces performances sont pour un économiste une forte croissance qui s’avère de plus durable. Certains pays ont une forte croissance mais très temporaire liée à un contexte de circonstances favorables.
A coté de ce caractère remarquable de la croissance, on a aussi un autre aspect, le caractère inhabituel de ces performances. Ces performances sont assez rares dans le contexte économique actuel. Elles permettant ainsi au pays de rattraper les économies les plus avancées. Ainsi le Japon, la Corée du Sud ou encore Taïwan font partie de ces pays. Ce genre de performances ne sont pas si courantes.
Enfin, il y a un caractère inattendu à ces performances. On considérait dans les années 1960, que ces économies étaient en développement, comparables à des économies africaines. On  n’imaginait pas que ces économies parviendraient à décoller, on les jugeait coincées dans une spirale de sous-développement tout particulièrement la Corée du Sud. Leur décollage fut donc une grande surprise.

D’autre part, un autre détail est surprenant : un grand nombre de pays est parvenu à se développer rapidement et durablement dans un espace assez concentré, à la suite du Japon et avant la Chine.

Tout cela est tellement surprenant, qu’on parle de « miracle » parce qu’on a de nombreuses difficultés à comprendre comment cette région en est arrivée là. La Banque mondiale estime qu’en trois décennies sept à huit pays asiatiques sont parvenus à se hisser dans les 12 premières économies du monde. Derrière l’expression « miracle asiatique » de la Banque Mondiale, il y a donc 7 pays qui sont concernés par ce terme : les quatre pays nouvellement industrialisés, aussi nommés quatre dragons : Corée du Sud, Taïwan, Hong-Kong et Singapour. Suit ensuite la seconde génération, parfois appelés les 3 tigres, avec la Thaïlande, l’Indonésie et la Malaisie. Ces 7 pays sont, dans l’idée de la Banque Mondiale, ceux qui ont suivi l’exemple japonais en dépit de différences fondamentales dans leurs politiques.

Les schémas de croissance globale du PIB révèlent bien la croissance de l’Asie du Nord-Est et de celle du Sud-Est tout en illustrant la diminution du cas de l’Afrique subsaharienne. En comparant avec d’autres régions du monde, on constate que l’ordre de grandeur de croissance pour notre région étudiée est toujours supérieur à 7, c'est-à-dire que c’est très fort. Seule l’Asie du Sud pourrait être comparable avec une croissance de 5,4, mais on reste loin du compte.
Ce qui se cache derrière la forte dynamique  économique n’est pas lié à la croissance démographique. En effet, la croissance du PIB par tête reste élevée en période où la démographie stagne voire recule. De nouveau, entre les différentes zones du monde, on constate la supériorité dans les chiffres de l’Asie orientale et la très faible croissance du PIB par tête en Afrique sur les mêmes périodes.
On peut souligner aussi la stabilité et le maintien sur 40 ans de la croissance moyenne du PIB par tête. Les nombres de l’Asie du Sud-Est sont là encore particulièrement élevés par rapport aux autres régions du monde. De plus sur les 39 années considérées, on en a pour l’ensemble de la zone 34 de forte croissance du PIB, les 5 années restantes étant des moments de récession ou de stabilité.

2.      Une succession de miracles

De manière générale, les années 1970 sont le moment de développement de la première génération d’économie asiatique. La seconde génération suivra seulement dans les années 1980. Enfin on peut ajouter plus récemment l’entrée de la Chine et du Vietnam dans les années 1990, qui serait une troisième vague miraculeuse.

L’idée que ces performances économiques sont inattendues est vérifiable dans le PIB par tête. Dans les années 1950, ce taux était comparable aux pays africains et nettement inférieur à celui des pays d’Amérique du Sud. La Corée du Sud est très proche de la république Centrafricaine. Ces économies partent donc de très loin.

3.      Les implications

Ce rattrapage économique les a donc fait passer de pays à faible économie à une économie en développement. On constate alors en conséquence, une chute de la pauvreté dans ces pays, une part croissante de l’Asie dans l’économie mondiale ainsi que dans le commerce mondial. Ainsi dans le PIB mondial, l’Asie est passée de 10% dans les années 1950 à 20% dans les années 2000. Idem dans le commerce mondial où l’Asie est passée de 10% dans les années 1970 à plus de 25% dans les années 2000. En conséquence, ces économies veulent jouer un rôle plus grand dans les décisions économiques mondiales.
Enfin, ce développement a poussé les analyses économiques à en faire des modèles de développement à suivre pour d’autres pays.


III.             Les caractéristiques du miracle économique asiatique

1.      Ouverture et dynamisme exportateur

La première manifestation de cette intégration dans les circuits se voit puisque la part des exportations a clairement augmenté tant dans l’ensemble que dans les produits manufacturés. Ces économies se sont intégrées dans les circuits en concurrençant les économies industrielles d’Occident. Elles parviennent à fabriquer et à exporter des produits manufacturés ce qui est nouveau quand on avait jusqu’alors des pays qui se contentaient d’exporter des matières premières.

Actuellement, les acteurs traditionnels sur la scène internationale commerciale (Japon, Allemagne et USA) perdent de leur importance et sont remplacés par la Chine.

2.      Profonds changements des structures productives et commerciales

Les structures productives de ces pays ont subi de grandes transformations qui à l’échelle des autres pays semblent significatives. Si on prend chacun des pays, on constate bien que la part des produits exportés ont pris une part beaucoup plus importante passant de 10% dans les années 1970 à 40% pour l’Indonésie, 50% pour la Malaisie, 60% pour la Thaïlande, dans les années 2000. Plus en détail, on constate que les produits de bases sont nettement moins exportés contrairement aux pays africains.

L’essentiel des exportations vers 1965 en Corée du Sud concernent le textile, les habillements et les chaussures, plutôt des produits bas de gamme. Le cas emblématique était par ailleurs l’exportation de perruques. Dans les années 1990, cela a diminué au profit d’un nouveau secteur, les machines électriques et électroniques.
Pour Singapour, on trouve au départ essentiellement des produits alimentaires, des textiles et un peu de raffinement de pétrole pour des produits chimiques. Dans les années 1990, l’alimentaire et l’habillement perde de leur importance pour les machines électriques et électroniques ainsi que les équipements d’ordinateur et de communication.
En Indonésie, on constate toujours la baisse des produits alimentaires pour une hausse des produits du textile et de l’habillement. La modification est tout aussi profonde mais d’un type différent des premiers pays développés.
En Malaisie, idem, chute de la nourriture pour l’électrique, l’électronique et les matériaux d’ordinateurs.
En Thaïlande, la part de nourriture a chuté mais reste importante, elle s’accompagne de la hausse des produits textiles, des produits électroniques et électriques ainsi que des composants d’ordinateurs.

Cela a poussé des auteurs à parler d’un schéma du « vol d’oies sauvages ». Le Japonais Kaname Akamatsu décrit ainsi le développement économique du Japon. Au sortir de la Seconde Guerre mondiale, le Japon ne bénéficie que d’assez peu de matières premières. En conséquence, le Japon importe à cette époque beaucoup de biens de consommation et de produits manufacturés. Ces produits importés sont alors décortiqués et analysés par les Japonais qui finissent par produire nationalement leurs propres produits. Lorsque le marché intérieur est saturé, les Japonais se mettent alors à exporter ce produit. Les bénéfices tirés de ces exportations sont ensuite réinvestis dans l’importation de nouveaux produits manufacturés plus techniques, qui sont à leur tour analysés, copiés puis exportés et réinvestis dans des produits techniques de plus en plus pointus.
Au final, le Japon s’est donc spécialisé sur le long terme dans des techniques très pointues telles la robotique.
On constate donc que le Japon est passé de produits d’habillement puis s’est spécialisé dans l’acier avec les bénéfices d’habillement, puis dans les télévisions après l’acier, puis les lecteur vidéo, … toujours en tirant les bénéfices de la production initiales.


On peut reproduire ce schéma avec les pays et alors constater un glissement géométrique des secteurs d’activités. Quand le Japon délaisse une production pour une autre, un autre pays va reprendre cette activité délaissée à son compte, se développer, se spécialiser et finalement délaisser ce secteur à un autre pays, … Du coup, cela permet d’analyser l’Asie comme une succession de pays avec des secteurs très spécialisés et pas tous de même valeur ajoutée. Une telle analyse est pertinente jusqu’aux années 1990 où les choses ont progressivement évoluées et remettent en cause ce schéma.

3.      Epargne et investissements

Ces pays ont tous un taux d’épargne élevé et un taux d’investissement élevé. Ce taux d’épargne est l’ensemble des taux d’épargne de tous les acteurs : entreprises, particuliers, État, … Ce taux considéré élevé à partir de 20% où il devient substantiel. Dans nos économies asiatiques, ce taux est au-delà des 20% dans les années 1970 et le reste toujours, à l’exception encore une fois des Philippines.
Le taux d’investissement est avant tout celui des entreprises et parfois aussi de l’État. Là encore, lorsqu’il dépasse les 20% on l’estime élevé. En Asie orientale, ce taux est très élevé encore plus tôt pour les pays de première génération que ceux de seconde génération. On a donc de nouveau un indice de ce développement asiatique.

Le taux d’égalité dans la distribution du revenu, mesuré avec l’indice de Gini (répartition de la population en fonction de la richesse nationale : x% du revenu est détenu par y% de la population) où plus on est près de la courbe de Lorenz, plus le pays répartit équitablement ses revenus. Un indicateur de Gini élevé dénote une inégalité élevée dans la répartition des revenus. Les taux d’inégalités dans ces pays asiatiques sont assez bas au départ et se réduisent encore avec le développement de ces pays, soulignant une tendance générale à l’égalité des revenus.

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