mardi 2 avril 2013

Moyen-Orient 29 - 03 (cours 6, fin)



Le minaret reste un point commun aux différents courants de l'Islam.



Les facteurs religieux


Sur l’islamisme : François Burgat, sociologue spécialiste de la question religieuse et de l’Islam.

Le premier problème géopolitique des religions c’est l’essor des islamismes surtout à partir des années 1970. Ce poids est difficile à mesurer, il n’existe pas réellement un seul islamisme mais il en existe quatre familles (cf le texte de George Mutin). De plus, l’islamisme est une nébuleuse qu’il faut étudier au travers des cellules qui s’en réclament, de leurs activités, … Les logiques islamistes sont évolutives et rappelons-le, les islamismes sont minoritaires chez les Musulmans, bien qu’ils aient souvent une forme de sympathie pour certains aspects de l’islamisme.

L’islamisme est relativement ancien avec le wahabbisme au XVIII° siècle. Mais c’est au XIX° siècle que les autres familles se sont développées. Ces familles se sont diffusées de manières nouvelles depuis la fin des années 1960 jusqu’au milieu des années 1970. Les raisons sont nombreuses, même si non insiste plus volontiers sur l’influence financière et idéologique de l’Arabie Saoudite avec son envoi de pétrodollars dans les autres pays, notamment musulmans et africains. Cela lui permet du coup, de promouvoir par la construction de mosquées, d’aides aux plus démunis, de scolarisation, … Cette influence passe par l’argent et les œuvres mais n’est pas systématiquement un succès.
Il y a aussi un développement de l’islamisme par l’opposition à l’Occident et tout particulièrement aux USA. Pour de nombreux individus, on ne peut régler la question d’Israël que par le conflit car l’ONU est bloquée par les USA et la Grande-Bretagne. Cette opposition à l’Occident va cristalliser les pensées islamiques. Il y a alors une substitution progressive d’un monde arabo-musulman à une volonté panarabique. Au panarabisme, l’islamisme tend à vouloir prendre sa place.
Enfin, il y a la question du chiisme révolutionnaire qui réussit à prendre le pouvoir en Iran en 1979. L’Arabie Saoudite n’est plus le seul État islamique, l’Iran l’est aussi. En plus, l’Iran a une autre forme d’islamisme avec une pensée religieuse et politique assez poussée. On a notamment une pensée économique construite. De plus, l’Iran se construit aussi contre les USA (cf Argo de Ben Affleck). D’un coup, l’Occident voit plusieurs faces à l’islamisme. De la fin des années 1970 aux années 1980, on voit la faillite des grands modèles d’État, dont notamment, selon Bertrand Badie : celui de la modernisation conservatrice (En Iran et au Maroc). Ces États sont des anciennes dynasties qui veulent avancer dans la modernisation (émancipation des femmes, armée modernisée, …) mais se retrouvent toujours avec une misère persistante qui va se confronter aux courants religieux. Dans le cas marocain, le roi incarne à la fois la nation mais est aussi rattaché à la religion, ce qui fait qu’il a pu éviter la chute du régime. Le Shah d’Iran n’ayant pas de dignité religieuse, cette religion s’est retrouvée contre le pouvoir. Les régimes qui se voulaient panarabiques (Égypte puis Irak) furent aussi des régimes modernisateurs qui ont chuté.

Texte de Burgat :
Burgat est questionné sur le succès inattendu des Salafistes en Égypte. Il explique que si nous sommes surpris par le score des frères musulmans, lorsqu’on connaît le pays, ce succès est logique. Les deux courants se définissent, entre autres, par leur évolution historique. Les Frères Musulmans furent persécutés par Nasser et durent faire des concessions à Nasser et au pouvoir pour conserver une modeste place politique. Les Salafistes eux furent littéralement marginalisés par le pouvoir et par leur auto-exclusion. Un schéma d’évolution et de progression vers le pouvoir place en périphérie les Frères Musulmans tandis que les Salafistes se sont auto-exclus du système électoral.
La convergence est assez forte entre les familles islamiques par leur entrée dans le jeu politique. Pour eux, prendre les armes pour s’affirmer leur semble logique et Burgat les compare aux Chrétiens en Palestine. La question de prendre les armes n’est pas propre à L’islam ni même aux Islamistes, c’est une attitude lorsqu’une communauté se sent menacée. Leur point de convergence étant tout de même un conservatisme moral, donc plutôt une forme d’intégrisme et de fondamentalisme comme retour aux sources originelles. Bien que l’islamisme demeure une doctrine politique.
Le Hezbollah est un parti chiite envers lequel beaucoup de chiites refusent d’y adhérer, même s’ils sont majoritaires au Liban. Dans ce pays, on a aussi le Hamal, parti chiite différent du Hezbollah. D’ailleurs au Liban, le Hezbollah s’est associé à un parti chrétien dirigé par le Général Michel Aoun.



Gaz ou pétrole ?



Le facteur énergétique


Le Moyen-Orient est aussi caractérisé par les ressources énergétiques diverses qui peuvent façonner la géopolitique de la région. Si l’on met de coté la question de l’eau au Moyen-Orient (dont le spécialiste sur cette question est Georges Mutin), il reste le sujet des hydrocarbures.
Le Moyen-Orient possède les 2/3 des réserves mondiales de pétrole ainsi que 40% des réserves mondiales de gaz. Au total, la région possède 60% de la consommation énergétique de la planète. L’avenir s’annonce encore radiaeux pour le Moyen-Orient puisque l’exploitation du pétrole continue de grimper, au moment même où les réserves de Mer du Nord vont s’épuiser. Du coup, le pétrole dans les zones moins accessibles du globe devient un vrai enjeu (le partage du pétrole en Antarctique va-t-il devenir source de conflits ? Les nappes pétrolières sous la banquise du Pôle Nord seront-elles exploitables et si oui par qui ? …). A coté de ces enjeux, l’Arabie Saoudite est le pays possédant le plus grand champ pétrolier du monde. Pour le gaz, le principal pays qui en possède reste la Russie, mais le plus grand champ de gaz au monde reste le Golfe Persique qui possède 20% des réserves mondiales.

Existe-t-il des alternatives aux hydrocarbures du Moyen-Orient ? Cette question s’est posée en 2009 lors de la conférence de Copenhague. Les pays en présence ont pris en compte le changement climatique et la nécessité de trouver d’autres sources d’énergie. Parallèlement la conférence s’est terminée sur le constat qu’on ne pouvait pour le moment passer à coté des réserves du Moyen-Orient. C’est le second constat, il n’existe aucune région dans le monde qui permette de proposer une alternative à l’exploitation des hydrocarbures du Moyen-Orient. En effet, cette région possède non seulement les réserves les plus importantes au monde, mais ces réserves sont aussi les plus accessibles et les moins nocives pour l’environnement lors de leur exploitation. En effet, en 2010, la côte Sud des USA fut confrontée à une marée noire importante, du fait de l’exploitation complexe et non totalement maîtrisée des nappes pétrolières dans le Golfe du Mexique par l’entreprise British Petroleum (BP).

Si l’on étudie plus en détail la géopolitique du Moyen-Orient selon les critères de ressources en hydrocarbures, on peut distinguer des pays producteurs (telle l’Arabie Saoudite et l’Irak) et d’autres n’étant que semi-rentiers (comme le Liban). Mais cela peut évoluer à tout instant. En effet, si le Liban est encore un pays rentier, la découverte de potentielles nappes de pétrole dans les fonds marins libanais, relance la question. D’ailleurs plusieurs pays revendiquent ces nappes quand bien même elles semblent dans l’espace libanais (Israël, Syrie, Turquie et Liban).
Au total, 95% des revenus du Moyen-Orient reposent sur cette manne d’hydrocarbures. Seul Dubaï a décidé de se reconvertir pour anticiper l’avenir. Mais l’équilibre de la zone est fragile. Ainsi, si la Chine achète son pétrole au Moyen-Orient, elle regarde énormément vers l’Afrique subsaharienne en dépit des instabilités que connaît cette région.
Au centre du Moyen-Orient, on trouve donc l’Arabie Saoudite, qui s’appuie pleinement sur ses ressources pétrolières. C’est ce qui fait de ce pays un acteur central dans la région. Face à elle, on a longtemps eu un Irak et un Iran suffisamment forts pour lui faire contrepoids. En revanche, depuis l’invasion américaine en Irak en 2003 et l’isolation de l’Iran dans la communauté internationale, cela est devenu discutable. L’invasion de 2003 par les USA visait d’ailleurs à stabiliser la région, en particulier à stabiliser les cours du pétrole. Il semble qu’aujourd’hui, cela est surtout retourner les rapports de force et pas nécessairement en bien.
Concernant  l’Iran, on peut souligner que le pays exploite moins qu’avant 1979 ces ressources pétrolières et gazières. De plus, les sanctions de l’ONU font que la communauté internationale ne peut lui acheter pleinement ses ressources. On verra alors peut être l’Iran relancer son exploitation dans les années à venir, mais la question environnementale influera-t-elle ou sera-t-elle mise de coté ?
Dernier point sur la question du pétrole au Moyen-Orient, ce sont des compagnies nationales qui exploitent les ressources sur place.

L’autre ressource énergétique de la région, c’est le nucléaire. Cette énergie est présente dans plusieurs pays. Au-delà de la question de l’énergie, c’est la question de l’armement nucléaire qui pose des problèmes. Ainsi le Pakistan possède l’arme nucléaire, de même qu’Israël. On trouve aussi une flotte américaine dans le Golfe Persique, possédant elle aussi son armement nucléaire. L’Iran en revanche, la question demeure. L’ONU, les USA et Israël tendent à affirmer que l’Iran va posséder l’arme nucléaire sous peu tandis que le pays concerné ne revendique que son droit au nucléaire civil. Plusieurs observateurs extérieurs estiment que l’Iran est encore bien loin de posséder l’arme nucléaire. Géopolitiquement, on aurait donc un équilibre de la Terreur dans cette région. Si l’Iran venait un jour (lointain) à posséder l’arme nucléaire, le risque d’une course à l’armement dans la région n’est pas à négliger.

Ecologie 28 - 03 (cours 7, fin)


Dans le cadre du développement durable,
l'aéroport Notre-Dame des Landes est certifié respectueux de l'environnement !



A.     La substituabilité des facteurs

Une quantité accrue de capital accumulé par les hommes, doit prendre le relais d’une quantité moindre de capital naturel pour ???. Les générations présentes vont consommer du capital naturel mais en contrepartie, vont léguer aux générations futures davantage de capacités de production sous forme de stock d’équipement, de connaissances, de compétences, … Les générations futures pourront faire mieux avec moins de ressources, c’est une logique du développement durable. Cette hypothèse signifie qu’une quantité accrue d’équipements, de connaissances et de compétences doit prendre le relais de quantités moindre de capital naturel pour assurer le maintien dans le temps des capacités de production et de satisfaction de bien-être des individus.

B.     L’économie de l’immatériel

Il s’agit de la mise en place de l’économie à base de services donc d’éléments immatériels. Le secteur tertiaire consomme peu d’énergie par rapport aux secteurs primaires et secondaires quand bien même il représente 70 % de l’emploi. Cette économie de la connaissance est un mélange de high-tech, d’informatique, d’électronique, de biotechnologie, … Donc en entrant dans cette économie immatérielle on pollue moins. Cependant, l’industrie a régressé dans l’emploi mais continue de croître en pollution et est souvent délocalisée ailleurs.
Mais l’économie immatérielle et non-polluante ne l’est pas tant que ça. Ainsi pour produire une puce de 2 grammes, il faut une forte quantité d’énergie. Tout ce qui a trait au stockage des données est aussi très polluant puisqu’il faut alimenter constamment en électricité les ordinateurs de stockage.

C.     L’éco-efficience

Nos appareils consomment moins d’énergie qu’auparavant, c’est évident. En revanche, plus on va dans le temps, plus on est équipé (portables, ordinateurs portatifs, …). Donc du coup, même plus écolo, nos appareils consomment moins mais on en a davantage, ce qui au final nous fait polluer plus qu’avant.

2.      La durabilité sociale

On a cherché des critères pour mesurer le bien-être des individus. Avec le critère des capacités, on cherche à mesurer et à atteindre des états d’être. Il faut être en capacité de se déplacer, de se nourrir de manière équilibrée (ne pas manger que des chèvres), d’être en bonne santé, … Ces critères doivent être, dans le cas où ils ne sont pas « normaux », rééquilibrés. Un exemple serait de mesurer l’adaptation du pays pour l’accessibilité aux handicapés. Idem, si on trouve une société où les femmes ne peuvent pas travailler. Le renforcement des capacités d’une personne va accroître ses capacités de réalisation ce qui permet d’améliorer son bien-être global. Ce bien être global étant une amélioration des conditions de vie.
Les critères d’accessibilité ont un rôle tout particulier, puisque la non-accessibilité à un certain nombre de biens fait naître la pauvreté. On est pauvre par manque de terres, de nourritures, de logements, d’emplois, … On cherche donc à égaliser les conditions en créant un jeu d’impôts dans un but redistributif. Aujourd’hui la richesse se mesure sur le Produit Intérieur Brut (PIB) et d’autres indicateurs sont en construction pour être plus pertinent, comme l’Indice de Développement Humain (IDH) : PIB par habitant, espérance de vie et niveau d’instruction. On a aussi plusieurs indices de bonheur.

La question qui taraude est de savoir si le développement durable ne dilue pas en fait le problème de l’environnement dans un cadre de développement économique. Le développement durable tient alors plus de l’idéal de justice.

Toute politique dans l’espace européen est faite dans le cadre du développement durable. C’est la thèse des gouvernants : le développement durable soutient la thèse de la compatibilité entre économie et environnement. D’où on arrive à l’Agenda 21 créé en 1992 à Rio, c’est une pensée de la Terre. Dans le bilan, on  trouve un texte intitulé l’action 21, où le but est de mettre en place à l’échelle locale des agendas 21, documents distant des actions à mettre en œuvre. Ces agendas 21 doivent s’organiser autour de trois axes : économie, social et écologie. En France, on met en place en 1993 des agendas locaux autour des grandes villes, des projets de territoires d’aménagement respectant les trois axes.  Ces actions sont listées mais aucune obligation de les mettre en œuvre n’est prévue. Cela s’organise à différentes échelles : villes, entreprises, universités, …

Enfin, le rapport Meadow sera créé pour rassurer les entreprises concernant le développement durable. Quand le terme est apparu, les entreprises étaient réticentes, mais le rapport Meadow les rassure. Depuis, toutes les entreprises ajoutent une dimension développement durable dans leur programme, ce qui souligne la faible contrainte que cela représente.
La responsabilité sociale et environnementale concerne les entreprises et celles-ci doivent insister sur les démarches qualités. Plusieurs entreprises vont lancer des initiatives de leur côté et seront jugées par des indicateurs comme le Global Compact, développé à l’ONU et qui fixait 10 grands critères de développement durable à respecter moyennant quoi, les entreprises avaient un label bénéfique à leur image. Du coup, le développement durable c’est la mise en œuvre d’une démarche qualité. Des entreprises auraient alors à fournir leurs consommation d’eau, d’électricité, … dans le cadre de Responsabilité Sociale et Environnementale. Normalisation et labellisation des structures sont aussi des mises en place du développement durable. Normalisation et labellisation sont des actions à mettre en œuvre et à respecter moyennant quoi on reçoit un label évoquant le développement durable (norme iso 14001, …). Ces labels certifient la mise en place d’un développement durable.
Après la normalisation par les structures, il y a l’approche par les produits. L’écoconception, concevoir un produit en envisageant son cycle de vie pour prévoir les impacts du produit fabrication, temps de vie, fin de vie. On peut aussi labelliser les produits : labels bio (AB, …), labels certifiant la provenance, labels écologique, ...

La mise en place du développement durable reste donc de savoir comment améliorer la performance environnementale, c’est une démarche de qualité. Le développement durable ne va pas régler la crise écologique, il va juste donner les solutions pour se rapprocher de l’optimum de pollution.


II.                   La décroissance

Le mouvement de la décroissance consiste à diminuer la consommation d’énergie. Mais cela contraignant à une diminution de la productivité, la décroissance n’est que peu relayée par les médias, encore moins par les politiques et les entreprises. « Moins de biens, plus de bien » est le slogan d’un groupuscule partisan de la décroissance. Comme cela est perçu comme inévitable par ses partisans, soit cette décroissance se fera dans la violence, soit cela se fera dans la prévention avec un changement progressif. La décroissance serait un retour à une forme de spiritualité d’entraide et de simplicité. L’idée est de décoloniser l’imaginaire et l’esprit pour admettre que le bonheur n’est pas que dans la consommation.
Dans la pratique, les Décroissants tentent de valoriser les corvées en des projets stimulant pour la population. En général, il s’agit d’une vision où un jour la décroissance aura lieu.

Politique du risque 28 - 03 (cours 7, fin)



 José Bové, céréales-killer ?


En Norvège, au Danemark, et en Autriche, les opinions publiques vont s’élever contre l’utilisation des OGM. Au même moment en France, le ministère de l’agriculture a la main, surtout en 1994, via Syngenta, grand groupe de l’industrie alimentaire qui propose de vendre un certain type de maïs, résistant à la pyrale, permettant aux agriculteurs de ne pas utiliser de pesticides contre cette maladie. Sans qu’il y ait de difficultés, Syngenta vend librement ces OGM. Mais en 1996, alors que le soja OGM peut être importé en Europe avec Monsanto, la réaction de Libération provoque une grande crainte dans la population et un lien est établi entre les OGM et la consommation de vache folle. Ce climat d’incertitude et de défiance renvoie à la recreancy, la parole scientifique n’est plus suffisante et produit davantage d’incertitudes que de certitudes. Greenpeace parle des envahisseurs biotech et tient en général un discours qui repose sur la logique médiatique où l’on simplifie le message. Les biotechnologies sont considérées comme des envahisseurs et Greenpeace rejette fondamentalement tout ce qui a trait aux biotechnologies puisqu’il s’agirait d’envahisseurs. Si la vision est réductrice, elle va frapper la population et sera transmise facilement dans les médias. On a parlé de Greenpeace comme un néostalinisme qui refusait de discuter avec les autres acteurs, braqué sur son discours et rejetant toute tentative de dialogue.
Dans le discours des activistes de Greenpeace, on perçoit une parole qui n’est pas véritablement irrationnelle. Les OGM ne sont pas rejetés parce qu’ils sont dangereux (Greenpeace comme les scientifiques n’en sait rien) mais parce qu’ils étaient imposés par les grands groupes industriels sans concertation. Arnault Apoteker n’est pas opposé à l’utilisation des biotechnologies mais bien à l’irréversibilité du fait d’accepter les OGM. C’est l’irréversibilité qui pose problème. En effet, comme on l’a dit, accepter les OGM c’est risquer de transmettre les gènes des plants d’OGM à d’autres cultures (par le moyen de la pollinisation notamment).
Corine Lepage alors ministre de la culture va reprendre ce discours et y ajoutant l’argument du respect des générations futures. Ainsi, selon elle, l’irréversibilité de l’ouverture aux OGM se double d’une forme de manque de respect des générations futures qui ne pourront pas revenir en arrière sur cette décision. Elle s’oppose donc au ministre de l’agriculture de l’époque, Philippe Vasseur. On voit donc s’opposer deux courants d’experts chacun ayant un ministre dans son bord. Du coup, il faut s’intéresser à la question des expertises. La Commission du Génie Biomoléculaire (CGB) dirigée par Albert Kahn, en charge d’émettre les avis d’experts sur toutes les questions concernant les OGM.
Lorsque José Bové décide de faucher des champs de colza transgéniques, il s’engage dans un type d’action qui illustre bien la désobéissance civile. Il veut envoyer au gouvernement un signal en vue d’améliorer la loi. Cette désobéissance civile a un objectif, celui d’améliorer le contenu de la loi, pour que ceux qui souhaitent cultiver sans OGM puissent le faire. Il déclare alors [approximatif] « Je sais qu’en agissant comme je l’ai fait, j’ai fait quelque chose d’illégal, mais c’était nécessaire et nous n’avions pas d’autres choix. En effet, la façon dont les produits OGM ont été imposés à l’espace européen, jamais les agriculteurs et ??? n’ont été consultés ». Par ces propos, Bové illustre parfaitement ce but de désobéissance civile.

En quoi les arguments scientifiques ont-ils abouti à une contre-expertise ? Si on devait faire un bilan des bénéfices des OGM : la première préoccupation est écologique. Les écolos seront sensibles à l’introduction d’OGM dans l’agriculture, permettant d’économiser non seulement les ressources aquifères, mais évitant aussi l’usage excessif d’intrants. Le second argument, c’est l’utilisation à bon escient des engrais. En effet, on ne risque plus trop de voir les productions agricoles ravagées par les insectes. Jean-Yves Le Déaut souligne que dans les pays où le coton OGM est exploité, il y aurait une réduction de 30 % à 50 % des pesticides dans ces cultures ce qui réduit aussi la mortalité paysanne. D’un autre coté, les grandes firmes internationales y voient aussi le moyen d’améliorer la qualité nutritionnelle des aliments, comme l’illustre l’exemple du riz doré (enrichi en vitamine A). Ce rapport de Jean-Yves Le Déaut porte à 400 millions les enfants atteint d’une carence en vitamine A et que le riz doré pourrait sauver.
A travers l’utilisation des OGM en Afrique, on voit aussi apparaître une toute autre analyse. Ainsi, dans la revue Tiers-Monde, Thierry Raffin souligne que lorsque Monsanto découvre de nouveaux plants transgéniques, alors les brevets de ces innovations sont dans les mains de ces entreprises avec l’aide des Etats. Lorsqu’ils les mettent en application, ils déstructurent l’agriculture de ces pays. Soulignant la révolution verte qui découlerait de la culture de ces OGM, pourtant dans les pays africains, la greffe de ces OGM ne prend pas et constitue un miroir aux alouettes. La principale résistance apparaît à travers les conditions sociales africaines. Les agriculteurs africains n’arrivent pas à s’approprier les OGM du fait de leur savoir faire traditionnel. Les semences génétiquement modifiées ne se combinent pas avec la culture traditionnelle de ces pays. Raffin en conclu que dans l’opposition entre tradition et modernité, les agriculteurs ne saisissent pas bien le principe des OGM  et c’est une forme de néocolonialisme qui s’inscrit dans le cadre de ces OGM en Afrique.

Les risques certains liés aux OGM sont de deux types. Le risque de l’allergie est la conséquence directe de l’introduction de nouveaux éléments dans un ingrédient. D’autres analystes soulignent qu’il existe donc un risque spécifique lié à l’introduction de nouveaux aliments dans un produit. A l’échelle d’une population, le risque potentiel est élevé. Ces scientifiques du coté du ministère de l’environnement, expliquent qu’on ne peut pas simplement juger sur les expériences passées, il faut continuer à faire des recherches pour démontrer qu’on ne risque rien.


Texte sur le principe d'équivalence en substance (p.64 - 68) :
L’équivalence en substance c’est lorsque l’on prouve que les caractéristiques structurelles d’un OGM sont les mêmes que les caractéristiques d’un organisme traditionnel. Mais des scientifiques contestent ce principe. Selon eux, il n’a rien de scientifique dans ce principe et les critères sont insuffisants. Soit d’autres tests doivent avoir lieu, soit il faut parler d’un concept et non d’un principe. Dans l’idée, on ne peut uniquement comparer les aliments dans leur structure chimique, il faut aller bien au-delà dans l’évaluation des risques et prendre en compte un panier de risques plus large que seulement la ressemblance chimique. Du coup, le débat s’enclenche chez les scientifiques, et par ce principe d’équivalence en substance, la parole de certains experts devient en fait, l’expression des intérêts de grandes firmes internationales et d’Etats comme les USA.


Un expert, c’est un scientifique qui est consulté par les profanes (acteurs politiques, …) et qui permet de justifier une décision. En général, les experts sont souvent invoqués dans les débats pour appuyer ou compléter les propos. Mais quand l’expert est convoqué par un politique, a-t-il un rôle de décideur ou est-il plutôt manipulé par le politique ? A chacun son interprétation, l’expert peut avoir une légitimité sociale et être entendu pour guider les politiques, mais il peut aussi se contenter de répondre aux attentes du politique. Ainsi Philippe Roqueplo explique que pour définir la relation d’expertise, il faut passer par la définition du contexte politique. Lorsque la Cité pose une question à un scientifique, l’expertise n’est pas la science, mais la réponse à une question originellement non-scientifique. On exploite donc la légitimité sociale des scientifiques mais plus encore, on leur pose une question en leur demandant de s’engager dans un processus de décision politique. Le problème qui en découle, c’est que les scientifiques appartiennent à un monde un peu à part et que plonger dans ce milieu politique, la question leur devient assez incompréhensible. Les effets pervers qui découlent de l’interface entre ce monde scientifique et ce monde politique ??? Ce qui est proposé de manière complexe dans la solution scientifique, est souvent simplifié par les politiques qui ne tiennent compte que des résultats, mutilant l’analyse scientifique et conduisant à un dialogue de sourds. La réponse complexe du monde scientifique est toujours adaptée au monde politique et paraît en ce sens simplifiée.
Sur la plupart des questions demandées par les politiques, les scientifiques n’ont pas de réponses (ce sont souvent des sujets nouveaux). Poussés par les politiques, les scientifiques doivent donner une réponse et donnent donc leurs certitudes personnelles en tant que scientifiques, ce qui rend leur réponse aussi banale que celles qu’on peut obtenir par un microtrottoir. Jean-Claude Ameisen sur la question du clonage reproductif (qui consiste à donner naissance à un clone à partir de n’importe quelle cellule du corps et une manipulation génétique basique) ne voit rien de choquant à produire artificiellement des jumeaux sans user d’arguments scientifiques.
Sur la question des pluies acides, Philippe Roqueplot rend compte d’un dialogue entre un scientifique et un politique qui est très clair sur cette question (cf texte de Roqueplo p.16-18).
L’affaire Pusztaï (texte p.120-126) consiste en une expérience scientifique où le professeur Pusztaï a testé les OGM sur des rats en faisant manger des OGM à un groupe de rats A et d’autres non-génétiquement modifiés à un groupe de rats B. A la fin de la recherche, Pusztaï a constaté que les rats qui ont mangé des OGM avaient systématiquement une taille plus faible que les autres. Il communique alors ces résultats aux médias avant d’en rendre compte aux autres scientifiques. Le Times titre que les OGM provoquent des problèmes de croissance et dans l’article Pustzaï déclare « Nous sommes tous des cobayes ». Cela provoque un tollé médiatique, mais aussi de la royal Society of Science qui retire son statut de scientifique à Pusztaï. En effet, Pusztaï a voulu répondre à la question sociale et politique avant même de soumettre ses résultats à ses pairs. En oubliant, de passer par le langage des experts avant celui des politiques, Pusztaï a simplifié son discours et l’a discrédité pour les scientifiques.

C’est à propos des OGM qu’il y a eu en 1998 le plus grand forum hybride : l’Office Parlementaire d’Evaluation des Choix Scientifiques et Technologiques (OPECST) organisé par les experts avec les citoyens (texte p.787-788). Cette expérience grandeur nature d’organisation participative a choisi 14 citoyens sélectionnés par l’IFOP et qui reçurent des enseignements sur le sujet pendant quelques jours. 5 débats successifs eurent lieu lors de plus de 10h de débats. Au terme de ces débats, les citoyens se sont retirés pour rédiger un avis qui fut transmis au pouvoir public pour influer les décisions pouvant être prises. Cette expérience inédite en France en 1998 ne fut possible que parce que les organisateurs avaient constitué un panel de la population française et avaient formé des citoyens sur le débat. Suite à cette formation, une phase de délibération a eu lieu. Au final, le panel donne un avis nuancé sur la question des OGM et conseille l’ouverture d’un moratoire sur la question de la consommation des OGM par des humains ou des animaux. C’est sur la base d’une délibération entre 14 citoyens représentatifs qu’on arrive à cette décision. Les 14 sélectionnés ont réussi à se réapproprier le débat, à contester les avis des experts et à révéler leurs contradictions. On a là une nouveauté, une forme d’expertise citoyenne avec des citoyens qui se sont intéressés au débat, se le sont réapproprier et ont finalement produit un avis.



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Partiel : Dissertation, thème général facile à se réapproprier. Deux critères de sélection : expliquer le plus clairement possible les concepts mobilisés (tireurs d’alarmes, recreancy, forum hybride, explication culturelle des risques, …) et la capacité à reconstituer les tenants et les aboutissants des termes du débat sur les biotechnologies. Ne pas oublier de garder la forme classique d’une dissertation : introduction (accroche, interprétation des termes du sujet (montrer la polysémie d’un des termes du sujet, de la pluralité d’interprétation de ce sujet) à problématique à annonce du plan), grandes parties avec des transitions, conclusion (synthèse et ouverture)).
Actions publiques et transformations : actions publiques à Etats / transformation : sur le plan symbolique et sur le fond. Donc comment l’Etat s’est transformé de la prise de décision à la prise d’indécision.